« Alors qu’il a reconnu les viols et que les faits ne sont pas prescrits, à ce jour, Albert (…) vit en France librement. Quel scandale ! Que fait la justice ? Attend-elle qu'(il) décède ? », s’est indigné dans un communiqué l’association Mouv’Enfants, qui lutte contre la pédocriminalité.
De 1992 à 2002, Frère Albert, appartenant à la Congrégation des frères du Sacré-Coeur, était directeur d’école à Conakry en Guinée. Il est soupçonné d’avoir abusé alors de plusieurs adolescents, qu’il entraînait dans l’équipe de football locale. A la suite d’une dénonciation, il avait été rappelé en France par sa hiérarchie en 2002.
Résident d’une maison de retraite près du Puy-en-Velay (centre) depuis son retour, l’octogénaire a été inculpé en 2017 pour « viols et agressions s3xuelles sur mineur », puis placé sous contrôle judiciaire.
En décembre 2024, le parquet où l’affaire est instruite a requis son renvoi devant la cour criminelle départementale, composée uniquement de magistrats professionnels.
Le juge d’instruction chargé de cette enquête complexe, qui s’est en partie déroulée à l’étranger, n’a pas encore rendu sa décision.
« C’est extrêmement long pour mes clients », déplore auprès de l’AFP Nadia Debbache, avocate de trois victimes guinéennes. L’une est décédée depuis mais sa soeur a repris la procédure. « Mes clients espèrent que justice soit rendue, être reconnus comme victimes afin de pouvoir se réparer », ajoute Me Debbache.
« Pourquoi les victimes sont en attente d’un procès qui ne vient pas, d’autant que certaines subissent des pressions en Guinée ? », interroge également le président de Mouv’Enfants, Arnaud Gallais. Craignant qu’il y ait « plusieurs dizaines de victimes », il réclame des moyens pour enquêter en Côte d’Ivoire où le religieux était en poste avant la Guinée.
« Ces chiffres sont totalement inexacts », s’insurge l’avocate de Frère Albert Me Aurélie Chambon, estimant que les faits ne sont « pas comparables » avec d’autres affaires ayant ébranlé l’Eglise catholique.
En mars 2017, l’homme avait lui-même confessé ses agissements, filmé en caméra cachée pour une émission de France 2 qui a révélé l’affaire. « En Guinée, j’étais à un moment donné comme un intouchable (…) je me sentais invulnérable(…) Quand ça s’est su, on m’a demandé de rentrer », avait-il déclaré.
Un membre de la congrégation, sollicitée par l’AFP, a déclaré que tout cela était « dans les mains de la justice » : « Nous n’avons plus rien à dire ».