Au milieu d’un ciel sans nuages, le soleil rayonne sur Boundiali : cette petite ville du nord de la Côte d’Ivoire accueille la première centrale solaire photovoltaïque, symbole de la transition énergétique amorcée par le pays, sans délaisser pour autant les énergies fossiles.
A la frontière avec le Burkina Faso et le Mali, deux pays sahéliens, le climat du nord ivoirien est chaud et sec environ huit mois par an, contrairement au sud humide et plus nuageux.
« L’irradiance (l’émission de rayons lumineux, ndlr) est très élevée » dans cette région, explique à l’AFP Franck Alain Yayo, ingénieur exploitation de la centrale solaire photovoltaïque de Boundiali, la première du pays reliée au réseau national.
Il existe une dizaine d’autres centrales solaires, bien plus petites, qui desservent localement quelques villages, précise t-il.
L’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime qu’une personne sur deux n’a pas accès à l’électricité en Afrique sub-saharienne alors que 40% des radiations solaires mondiales touchent cette région.
Et si le continent a doublé ses capacités de production d’énergie propre en 10 ans, le renouvelable africain ne pèse que 2% des capacités mondiales.
A Boundiali, 68.000 panneaux solaires achetés en Chine, en rang sur 36 hectares, reçoivent la lumière du soleil – et non la chaleur – pour la transformer en électricité, depuis la mise en service de la centrale en juin 2023, deux ans après le début des travaux.
D’ici la fin de l’année prochaine, l’objectif est de doubler leur nombre pour atteindre une capacité de production de 80 MWc (mégawatt-crête, la puissance électrique maximale) ce qui permettrait d’économiser quelque 60.000 tonnes équivalent CO2 par an, selon les autorités.
Le coût global de la centrale est de 75,6 millions d’euros, financés par la Côte d’Ivoire, un prêt allemand et un don de l’Union européenne.
« C’est le résultat d’un engagement de longue date de l’UE dans le secteur de l’énergie renouvelable, avec presque 140 millions d’euros depuis 2017. D’autres centrales vont suivre, ainsi que la réhabilitation de barrages hydroélectriques ou la valorisation de la biomasse », explique à l’AFP l’ambassadrice de l’UE en Côte d’Ivoire, Francesca di Mauro.
Mais les financements publics internationaux qui accompagnent l’Afrique subsaharienne dans cette transition ne suffiront pas. En 2023, l’AIE appelait à « accélérer les investissements privés » pour qu’ils représentent 60% des financements en énergies propres.
Et à l’heure actuelle, le solaire reste une goutte d’eau dans le mix énergétique ivoirien: la centrale de Boundiali contribue pour 1% de la production nationale.
L’électricité provient principalement des centrales thermiques à gaz (près de 70% de la production nationale) et des centrales hydroélectriques (environ 30%), toutes situées dans le sud du pays.
D’ici 2030, le pays s’est engagé à porter sa part de renouvelable à 45%, dont 9% de solaire, et de réduire de 30% ses émissions de gaz à effet de serre.
Coût « très bas »
Pas question pour autant de laisser tomber les énergies fossiles: la Côte d’Ivoire a récemment trouvé deux énormes gisements de pétrole et de gaz naturel.
L’un d’eux, le gisement Calao, découvert en mars « permettra à terme de répondre aux besoins du pays pour la production d’électricité », selon le ministre des Mines, du Pétrole et de l’énergie, Sangafowa Coulibaly.
De quoi peut-être espérer réduire la facture d’électricité, dont l’augmentation de 10% en janvier fait gronder les Ivoiriens.
« Chaque jour le soleil brille sur nos têtes », le coût de production est « très bas », assure M. Yayo, à Boundiali.
Cet ingénieur formé au Burkina Faso voisin regrette que son pays n’ait ni « la technologie », ni « l’expertise » dans de la formation.
L’entreprise publique ivoirienne CI-Energies (Côte d’Ivoire Energies), chargée de l’infrastructure de Boundiali, sous-traite temporairement avec le groupe français Eiffage, qui forme une grande partie des employés, dont la plupart sont des habitants de la zone.
Sur ce territoire d’environ 92.000 âmes, quelque 350 personnes ont été embauchées depuis le début de la construction de la centrale. La plupart sont embauchés en contrats courts pour installer des panneaux solaires ou assurer la maintenance.
Oumar Konaté est l’un d’eux: avant, il travaillait dans l’agriculture, en plus de « petits boulots en ville », comme « aide-maçon ». « Je préfère travailler ici », « le salaire est mieux » et « j’arrive à nourrir ma famille », affirme t-il, rappelant que dans cette ville du nord rural, il est « très difficile » de trouver du travail.
« Il fallait corriger une injustice », affirme Affa N’Guessan, chargé de recruter pour la centrale, via son agence, Humans job.
Avec l’AFP
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