Le Maroc est devenu ces dernières années l’un des terrains favoris de l’expansion économique de la Chine. Des accords industriels en cascade, des implantations d’entreprises stratégiques et des annonces d’investissements à plusieurs milliards de dollars illustrent cette montée en puissance.
Cette dynamique ne doit rien au hasard : elle résulte d’un calcul précis, au croisement d’intérêts logistiques, commerciaux et géopolitiques.
Aux yeux de nombreux groupes chinois, le Maroc représente un point de passage efficace dans un environnement international devenu plus contraignant.
Situé à la croisée des routes commerciales africaines et européennes, le pays offre une position géographique idéale pour contourner les difficultés croissantes liées aux échanges internationaux : taxes, quotas, instabilité réglementaire ou rivalités politiques.
Les accords de libre-échange dont bénéficie le Maroc avec l’Union européenne jouent également un rôle clé. Ils permettent aux entreprises qui y produisent de profiter de débouchés larges sans supporter les coûts liés à certaines barrières douanières.
Cette ouverture, combinée à une main-d’œuvre compétitive et à des infrastructures développées, pousse les industriels à considérer le Maroc non plus comme un simple marché, mais comme une base d’exportation fiable.
Au cœur de cette offensive économique se trouve l’industrie des véhicules électriques. Depuis plus de vingt ans, Rabat soutient la création de filières industrielles dans l’automobile, un domaine qui a vu arriver des constructeurs européens, rejoints désormais par des groupes asiatiques.
C’est dans ce contexte que de nombreux fabricants chinois, spécialisés notamment dans les batteries et les composants électriques, multiplient les implantations.
L’entreprise Gotion High-tech, active dans la production de batteries de nouvelle génération, fait partie des poids lourds récemment installés. Et elle n’est pas seule.
En quelques années, les investissements cumulés dans ce segment ont franchi la barre des 10 milliards de dollars, traduisant une volonté claire d’utiliser le Maroc comme point d’appui vers des marchés situés de l’autre côté de la Méditerranée, mais aussi vers l’Afrique de l’Ouest et centrale.
Pour Pékin, l’intérêt est double : profiter d’un environnement stable pour implanter ses capacités de production et répondre à la demande croissante de véhicules propres en Europe, sans être directement exposé à la volatilité des relations sino-occidentales.
Chine : réduire la vulnérabilité géopolitique tout en consolidant sa présence industrielle
Dans un contexte global marqué par des tensions commerciales et des blocages logistiques, la stratégie chinoise au Maroc vise aussi à diversifier les points d’accès à l’économie mondiale.
En multipliant les partenariats dans des pays qui échappent aux rivalités frontales, Pékin cherche à limiter les conséquences des mesures protectionnistes imposées ailleurs.
Mais cette présence chinoise ne se limite pas à un simple repli tactique. Elle transforme en profondeur le tissu économique marocain. En apportant de nouvelles compétences industrielles, en structurant des filières complètes autour de la production électrique et en connectant le pays à des chaînes de valeur mondiales, ces investissements participent à redéfinir le rôle du Maroc dans les échanges globaux.
À terme, cette dynamique pourrait faire du royaume un carrefour industriel incontournable pour les technologies de demain. Un pari sur la durée, dont la Chine espère tirer des bénéfices économiques, mais aussi diplomatiques, dans un monde en pleine recomposition.