Au cours des six derniers mois, le réalignement des priorités mondiales et des conditions extérieures de plus en plus turbulentes ont continué de mettre à l’épreuve l’Afrique subsaharienne. Pourtant, les économies de la région se révèlent résilientes. Comme perspectives économiques récentes pour la région, la croissance économique devrait se maintenir à 4,1 pour cent cette année, avec une légère reprise à 4,4 l’année prochaine. Une telle stabilité reflète des années d’efforts de réforme importants dans les économies clés.
La région abrite plusieurs des économies à la croissance la plus rapide au monde, Côte d’Ivoire, Éthiopie, Rwanda, et Ouganda. Pourtant, les États dépendants des ressources et touchés par un conflit ont du mal à maintenir leur dynamique. Pour eux, les gains de revenu par personne restent modestes, environ 1 pour cent par an en moyenne, et moins dans les pays les plus pauvres.
Cette divergence est en partie due au fait que les marchés des matières premières tirent dans des directions différentes : les prix du pétrole ont chuté depuis avril, tandis que les prix du cacao, du café, du cuivre et de l’or sont en hausse. Les pays sont également confrontés à des coûts d’emprunt élevés, bien qu’inférieurs à ceux du début de cette année. L’Angola, le Kenya, le Nigeria et la République du Congo sont récemment revenus sur le marché obligataire international.
La politique commerciale mondiale et le paysage de l’aide se sont également détériorés selon le FMI. Les droits de douane sur les exportations vers les États-Unis ont augmenté et l’accès préférentiel au marché en vertu de l’African Growth and Opportunity Act a expiré. Même si le volume des échanges commerciaux soumis à des droits de douane est relativement modeste pour la plupart des pays de la région, les effets des tensions commerciales se feront probablement sentir en raison de perspectives de croissance mondiales plus sombres et de la volatilité des prix des matières premières.
Pendant ce temps, la forte baisse de l’aide étrangère frappe plus durement les États les plus pauvres et les plus fragiles. Les gouvernements qui tentent de redéfinir les priorités des dépenses sont également confrontés à des contraintes de capacité et à une marge de manœuvre limitée dans les budgets.
Résilience testée
Même si la résilience de l’Afrique subsaharienne est encourageante, les vulnérabilités se sont accumulées et continueront de tester la région. De nombreux gouvernements sont désormais confrontés à un mélange difficile de pressions budgétaires, monétaires et extérieures qui menacent les réformes durement acquises et pourraient compliquer les réponses aux chocs futurs. Les coûts du service de la dette augmentent rapidement, ce qui réduit les budgets et l’espace réservé aux dépenses de développement. La fragilité budgétaire continue de troubler la région, en particulier parmi les économies à faible revenu. Vingt pays courent désormais ou courent un risque élevé de surendettement. Et à mesure que les gouvernements s’orientent vers les emprunts intérieurs, les banques sont plus exposées au risque de dette publique.
L’inflation, bien qu’elle s’atténue globalement, dépasse toujours 10 pour cent pour environ un cinquième des économies de la région. Et même si certains pays ont reconstruit leurs réserves internationales, elles restent étendues à une grande partie de la région.
Dans ce contexte difficile, nous voyons deux grandes priorités politiques.
Relèvement de recettes
Premièrement, générer davantage de revenus. Les besoins de développement de la région restent immenses, mais le financement extérieur est rare et le fardeau de la dette lourd. La mobilisation des recettes intérieures dans le pays est une voie essentielle vers un espace budgétaire durable, tandis qu’une meilleure gestion de la dette peut réduire les coûts d’emprunt et élargir l’accès aux fonds. Stimuler la collecte des impôts constitue depuis longtemps un défi pour les finances publiques de la région. Les efforts passés montrent ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Une réforme efficace exige une attention à la fois à la politique fiscale (quoi et combien taxer) et à l’administration fiscale (comment collecter). Les pays qui ont fait des progrès tels que le Ghana, le Rwanda et la Tanzanie l’ont fait numériser leurs systèmes fiscaux : piloter les réformes, soutenir les agents du fisc et impliquer les citoyens. D’autres ont appris qu’un soutien public limité peut faire dérailler des prélèvements mal conçus. La leçon est claire : les progrès dépendent autant de la confiance et du séquençage que des correctifs techniques.
Étant donné que les gens sont plus disposés à payer des impôts lorsqu’ils voient l’argent public dépensé judicieusement, les gouvernements doivent associer la réforme des recettes à une prestation de services visiblement améliorée, à des contrôles de dépenses plus stricts et à des efforts pour lutter contre la corruption et renforcer la responsabilité. Sans de telles améliorations, les gains de revenus s’avéreront éphémères.
Gestion de la dette
L’amélioration de la gestion de la dette est également essentielle. Des institutions de gestion de la dette transparentes et crédibles peuvent réduire les coûts d’emprunt et attirer les investisseurs. La publication de données complètes sur la dette, le dialogue ouvert avec les créanciers et le renforcement des procédures d’approbation et de surveillance sont des premières étapes clés.
Une meilleure gestion de la dette soutient également l’accès à des financements innovants. Des instruments tels que le financement mixte, qui combine des fonds concessionnels et privés, peuvent canaliser les investissements vers l’énergie verte, la santé et les infrastructures. Les accords entre les gouvernements et les créanciers visant à remplacer la dette souveraine existante par des passifs qui incluent des dépenses pour un objectif de développement spécifique, connus sous le nom d’échanges de dette contre développement, peuvent favoriser des gains sociaux ou environnementaux et ont été testés en Côte d’Ivoire entre autres.
Mais pour intensifier ces initiatives, les gouvernements ont besoin d’une réglementation crédible, de données transparentes et de procédures simplifiées. Ces outils, utilisés correctement, peuvent contribuer à jeter les bases d’une croissance plus résiliente et inclusive.
