Au Soudan, les paramilitaires des FSR sont approvisionnés en carburant illicite par les forces du maréchal Khalifa Haftar, l’homme fort de l’est libyen, en contrepartie du « soutien crucial » que lui apportent les Emirats arabes unis depuis une décennie, affirme mercredi un rapport de l’ONG américaine The Sentry.
Le Soudan est ensanglanté depuis avril 2023 par une lutte pour le pouvoir opposant l’armée aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), qui a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé près de 12 millions de personnes.
Depuis deux ans, « le camp Haftar est un fournisseur clé de carburant pour les FSR », assure The Sentry, dans une étude intitulée « Montée du trafic de carburant en Libye ».
Selon l’ONG, l’essence et le diesel issus majoritairement de trafics illicites ont facilité « les déplacements et opérations tactiques des FSR au Darfour », passé fin octobre sous le contrôle total des paramilitaires.
Ces fournitures sont le reflet de « la profonde loyauté des Haftar envers le gouvernement émirati » qui est « un soutien crucial des forces » du maréchal, selon The Sentry, qui a sollicité en vain les Emirats et les FSR pour des commentaires.
Les Émirats sont régulièrement accusés par l’armée soudanaise et des rapports indépendants de fournir armes, carburant et mercenaires aux FSR, ce qu’ils ont toujours démentis.
« En raison du soutien idéologique, diplomatique, financier et politique des Emirats à la famille Haftar depuis 2014, le gouvernement émirati occupe une position privilégiée aux yeux des forces de Haftar, les rendant redevables à Abou Dhabi », indique The Sentry.
L’acheminement « de carburant et d’autres aides » aux FSR a également permis à la famille Haftar de renforcer « sa chaîne de commandement et son contrôle du sud-est libyen », selon l’ONG.
Les FSR ont pris le contrôle en juin de la zone frontalière avec la Libye, dans un triangle stratégique bordant l’Égypte voisine.
Dès le début des combats en avril 2023, Saddam Haftar, l’un des fils Haftar, s’était rendu dans la région de Koufra (sud-est libyen), près de la frontière avec le Soudan, pour « superviser la fourniture de carburant au chef des FSR, le général Mohamed Hamdan Dagalo », souligne le rapport.
Des brigades de Haftar ont aussi été renforcées en matériel et effectifs pour « maintenir des expéditions ininterrompues de carburant et autres biens via la frontière » et garantir un « contrôle plus strict d’actifs clés » comme l’aéroport de Koufra ou la raffinerie de Sarir (centre-est), qui « fonctionne presque exclusivement à des fins de contrebande vers le sud », selon l’ONG.
En outre, les forces de Saddam Haftar « protègent le passage des ressources militaires fournies (aux FSR) par les Émirats via l’est de la Libye » et « ont coordonné des transferts occasionnels d’armes aux FSR au Darfour », selon The Sentry.