Le 1er ministre du Sénégal, Ousmane Sonko, oublie la France et va se rendre dans ce pays qui est une puissance militaire mondiale. Il va se rendre en Chine.
En tournant le dos à la tradition qui est de se rendre en France pour une première visite, Ousmane Sonko fait plus qu’un choix géographique : il imprime une orientation nouvelle à la diplomatie sénégalaise.
En zappant la France et en choisissant cette puissance militaire mondiale comme première destination officielle hors du continent, Ousmane Sonko confirme sa volonté de repositionner le Sénégal dans un échiquier mondial aux équilibres mouvants.
Ce déplacement marque aussi une forme de rupture, soulignant l’intention d’alléger les liens historiques avec l’ancienne puissance coloniale pour ouvrir des canaux alternatifs, davantage axés sur des partenariats économiques que sur l’héritage politique.
Cap sur Pékin : un agenda économique dense
Du 22 au 27 juin, Ousmane Sonko sera reçu par son homologue chinois, Li Qiang, dans un cadre diplomatique où les intérêts sont clairement définis. Le Sénégal entend tirer le meilleur parti de ce voyage pour renforcer des axes de coopération déjà actifs. L’agenda comprend plusieurs rencontres bilatérales et une participation annoncée au Forum économique mondial d’été, étape clé pour promouvoir la destination Sénégal auprès d’un parterre d’investisseurs. À travers ce déplacement, Dakar cherche à attirer des financements ciblés dans des projets structurants, en continuité avec les accords posés lors de la visite du président Diomaye Faye en 2024.
Ce nouveau chapitre vise également à faire de la capitale sénégalaise un point de connexion logistique et commercial en Afrique de l’Ouest, en s’appuyant sur les infrastructures prévues dans le cadre de l’initiative chinoise de la Ceinture et la Route. Pour les autorités sénégalaises, Pékin représente un levier d’accélération dans des domaines tels que le transport, l’énergie, les zones industrielles ou la digitalisation des services publics. En choisissant de pousser la porte chinoise à ce moment précis, le gouvernement montre qu’il cherche des relais d’influence là où les possibilités de financement et de transformation rapide sont les plus concrètes.
Un test de crédibilité internationale pour le gouvernement
Cette visite officielle ne se limite pas à des annonces économiques ou symboliques. Elle constitue un test de crédibilité pour l’exécutif sénégalais sur la scène internationale. Après des mois de transition politique marqués par une forte attente populaire et des promesses de rupture, le duo exécutif Diomaye-Sonko est observé avec attention. Pékin, qui privilégie les interlocuteurs stables et les stratégies lisibles, attend des propositions précises, accompagnées de garanties solides. L’enjeu est double : convaincre les investisseurs de miser sur la stabilité du pays, et démontrer que le changement de cap politique n’affaiblit pas la cohérence des projets engagés.
En quittant le continent pour s’afficher à Pékin, Ousmane Sonko amorce une étape diplomatique décisive. Il s’agit autant d’attirer des capitaux que de redessiner l’image extérieure du Sénégal, en s’éloignant des réflexes du passé pour bâtir des alliances basées sur l’efficacité et la complémentarité. Ce déplacement, attendu à bien des égards, pourrait devenir l’un des marqueurs les plus visibles du nouveau style gouvernemental. Encore faudra-t-il que les ambitions trouvent leur traduction dans des accords tangibles et des retombées mesurables sur le territoire.