La Russie constitue une « menace durable » pour la sécurité en Europe, après la sortie du Kremlin, identifiant comme « son principal adversaire sur le continent », la France, d’après le plus haut gradé français.
En effet, lors d’une rare conférence de presse, le chef d’état-major des armées, le général Thierry Burkhard, a longuement brossé le tableau des menaces pesant contre le pays et des « crises qui se multiplient et se superposent » dans le monde et sont régulièrement instrumentalisées pour miner la cohésion nationale, « élément-clé de la résilience de la Nation ».
Intégrer un changement de référentiel stratégique
« Il faut qu’on intègre qu’on est bien face à un changement de référentiel stratégique (…), il ne faut pas s’attendre à horizon visible à un retour en arrière » et « faire le dos rond » en espérant un retour à un ordre international plus stable, selon lui. « Il faut plutôt se préparer à gérer le monde tel qu’il est aujourd’hui ».
Le général s’exprimait à deux jours d’un discours aux armées du président français Emmanuel Macron dans lequel il « va tirer les conclusions en matière d’efforts de défense », selon l’Elysée, qui promet des « annonces majeures ».
Le sombre tableau dépeint par le général Burkhard pourrait conduire à une hausse supplémentaire du budget militaire français, dans un contexte de finances publiques mal en point et de traque aux économies.
« Notre capacité à afficher notre détermination (…) c’est le meilleur moyen pour ne pas se retrouver aujourd’hui confronté à un engagement majeur. Et ceci oui, probablement, a un coût et nécessite de bien réfléchir à ce dont on a besoin », a estimé le chef d’état-major des Armées.
En l’état, la Loi de programmation militaire française (LPM) prévoit 413 milliards d’euros pour les armées entre 2024 et 2030, avec des augmentations budgétaires annuelles de 3 milliards.
« Terrorisme », « instrumentalisation de l’immigration clandestine », attaques hybrides et désinformation, délitement de l’ordre international ou encore conséquences du changement climatique, le général Burkhard a partagé certains constats d’une nouvelle Revue nationale stratégique qui doit être publiée dans les prochains jours.
« La Russie est partie prenante de toutes les menaces que je viens de décrire et elle constitue à ce titre une menace durable et qui est pour moi la plus dimensionnante », a-t-il déclaré, jugeant qu’elle a « tous les attributs d’un Etat totalitaire ».
La Russie menace la sécurité de l’Europe après avoir désigné son principal adversaire
Il considère Moscou comme une « puissance de nuisance », que ce soit avec les sabotages d’infrastructures sous-marines, les campagnes de désinformation en France ou en Afrique, les actes d’espionnage ou les actions inamicales de ses satellites dans l’espace.
« Malgré les pertes incroyables qu’elle subit » en Ukraine, « avant 2030 (elle) constituera à nouveau une force constituant une vraie menace à nos frontières », a encore jugé le chef d’état-major.
« En Ukraine se joue d’une part la sécurité de l’Europe, mais (…) aussi la place des pays européens dans le monde de demain ».
La réponse doit être européenne, même s’il faut « absolument conserver le lien avec les Américains » dont « le niveau d’engagement va forcément baisser », selon le général Burkhard.
D’où l’importance du « message » envoyé par les Européens avec la « coalition des volontaires » emmenés par Paris et Londres, prêts à se déployer pour prévenir une reprise du conflit après un hypothétique cessez-le-feu entre l’Ukraine et la Russie.
Dans ce contexte, Moscou a identifié la France comme étant « son principal adversaire en Europe », « c’est (Vladimir) Poutine qui l’a dit », selon lui. « Cela ne veut pas dire qu’il ne s’occupe pas des autres pays », a-t-il précisé.
La France, puissance nucléaire protégée par sa dissuasion, n’est pas menacée de « se faire attaquer directement et lourdement sur le territoire national », mais Moscou a « beaucoup d’autres options » via des actions hybrides, a-t-il fait valoir.
Le Premier ministre François Bayrou avait observé en mars qu’après l’Ukraine, la France était « le pays le plus visé en Europe par les tentatives de manipulation venant de l’étranger » et dénoncé des « interventions massives venant de Russie ».
Avec AFP