Alors que ce 28 janvier, le Mali, le Burkina Faso et le Niger faisaient sécession au sein de la CEDEAO en annonçant leur retrait de l’organisation ouest-africaine, beaucoup se sont demandé la possibilité d’une nouvelle monnaie.
Outre l’affaiblissement politique de la Communauté, ce départ en fanfare jette une ombre sur l’avenir du franc CFA et ravive les rumeurs autour d’une monnaie commune des pays du Sahel.
Baptisé avec humour le « sahel » par les internautes, ce projet monétaire circule dans les couloirs du pouvoir malien depuis la signature en 2023 de la charte de l’Alliance des États du Sahel (AES).
Sans évoquer ouvertement une monnaie unique, ce texte fondateur prône « l’émancipation économique » du trio sahélien.
Portée par une opinion favorable, l’idée séduit même au-delà des frontières de l’AES.
« 80 à 90% des jeunes Africains pensent la même chose : il faut sortir du franc CFA », assurait l’entrepreneur camerounais William Elong début 2023.
« L’autonomie monétaire est essentielle au développement », martelait-il.
https://twitter.com/AESinfos/status/1751933733198831754
Si le chemin est encore long, les ministres des Finances de l’AES ont acté début décembre la création d’un fonds de stabilisation et d’une banque d’investissement communs.
Surtout, ils planchent sur une étude pour explorer « tous les scénarios possibles » concernant « l’union économique et monétaire » du trio sahélien.
La situation économique du Mali, du Burkina et du Niger permet-elle une nouvelle monnaie ?
Sur le plan de la dette (autour de 50% du PIB), oui. Celle des déficits publics est plus contrastée. Des efforts seront indispensables pour respecter les critères de convergence monétaire.
Mais les défis techniques et politiques restent immenses pour créer une nouvelle monnaie. Outre l’impression physique des billets, il faudra garantir la convertibilité, choisir un régime de change et éventuellement mettre sur pied une banque centrale commune.
Quels avantages cette monnaie offrirait-elle ? Ses partisans mettent en avant le gain d’indépendance vis-à-vis de la France et des garanties de stabilité moindres qu’avec le franc CFA. Ses détracteurs insistent sur les risques d’inflation et de change trop fluctuants.
Le débat agite la sphère économique africaine. Il reproduit les lignes de fracture habituelles sur la pertinence du franc CFA et de son remplaçant avorté, l’Eco. Entre les adeptes du maintien d’une parité fixe avec l’euro et ceux d’un régime de change flexible, le match s’annonce serré.
La question d’une monnaie commune de l’AES est encore embryonnaire. Mais à l’heure des projets d’intégration monétaire, du Bitcoin ou de devises digitales portées par des banques centrales, elle alimentera encore longtemps le débat public ouest-africain.
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