Une brise nouvelle souffle sur l’embouchure du fleuve Congo en RDC avec la construction d’un nouveau port par un pays d’Europe.
Là où les eaux tumultueuses du plus puissant cours d’eau d’Afrique centrale rencontrent l’océan Atlantique, un projet titanesque prend en effet forme.
Le Portugal, par l’entremise de son fleuron industriel Mota-Engil, s’apprête à doter la République démocratique du Congo (RDC) d’une infrastructure portuaire qui pourrait redessiner les contours économiques de toute une région. Mais ce n’est pas tout, c’est aussi un investissement colossal de 1,2 milliard de dollars – soit 728 milliards de francs CFA – qui marque une étape dans le désenclavement de ce géant africain.
L’annonce est tombée le 20 mars 2025 à Dubaï. Le groupe émirati DP World, maître d’œuvre du projet, a officiellement confié la construction du port de Banana à l’entreprise portugaise Mota-Engil.
Cette signature scelle un partenariat entre les deux entités et concrétise un rêve longtemps caressé par la RDC : disposer enfin d’un accès maritime direct et moderne pour ses échanges commerciaux.
À coup de milliards, un port qui va sauver la RDC
Car voilà bien le paradoxe congolais : ce pays aux dimensions continentales – le deuxième plus vaste d’Afrique – ne dispose que d’une fenêtre maritime dérisoire de 37 kilomètres.
Une étroite bande côtière qui n’a jamais été dotée des infrastructures nécessaires pour répondre aux besoins d’une nation de près de 100 millions d’habitants.
Jusqu’à présent, la RDC dépendait largement des installations portuaires de ses voisins – Pointe-Noire en République du Congo, Dar es Salam en Tanzanie ou encore Lobito en Angola – pour ses importations et exportations. Un détour coûteux qui grevait lourdement sa balance commerciale et freinait son développement économique.
Le port en eau profonde de Banana entend remédier à cette situation. Situé stratégiquement à l’embouchure du fleuve Congo, il offrira à la RDC une porte d’entrée directe sur l’océan Atlantique.
Sultan Ahmed bin Sulayem, président-directeur général de DP World, n’a pas manqué de souligner l’importance de ce projet.
« Ce partenariat garantira que cette infrastructure soit construite selon les normes les plus élevées », a-t-il déclaré, insistant sur la contribution du port à la croissance économique du pays et à la création d’opportunités pour la population locale.
Le choix de Mota-Engil pour mener à bien ce chantier d’envergure n’est pas anodin. L’entreprise portugaise, forte de son expertise dans le domaine du génie civil et des infrastructures complexes, apporte une caution technique précieuse au projet.
Comment sera construit le port en RDC ?
Le développement du port suivra une approche progressive. La première phase prévoit la construction d’un quai de 600 mètres de long, capable d’accueillir des navires de grand tonnage et d’assurer une capacité de manutention annuelle de 450 000 EVP (équivalent vingt pieds).
Une zone de stockage de 30 hectares complétera cette infrastructure initiale. Plus ambitieuse encore, la seconde phase portera la longueur totale du mur de quai à plus de deux kilomètres, multipliant considérablement les capacités d’accueil et de traitement du port.
Les retombées économiques attendues donnent le vertige. Selon les projections de British International Investment, le port de Banana pourrait réduire les coûts du commerce en RDC de 12%.
Plus impressionnant encore, il générerait environ 85 000 emplois directs et indirects tout en stimulant les échanges commerciaux de plus de 1,12 milliard de dollars.
La contribution au PIB national est estimée à 0,65% supplémentaires, un chiffre significatif pour un pays qui peine encore à exploiter pleinement son immense potentiel.
Au-delà des chiffres, c’est toute l’économie congolaise qui pourrait être dynamisée par cette nouvelle porte d’entrée maritime.
La RDC, véritable scandale géologique tant ses sous-sols regorgent de richesses minérales – cobalt, cuivre, coltan, diamants, or – pourra enfin exporter ses ressources sans dépendre des infrastructures de ses voisins.
Un gain d’autonomie et d’efficacité qui pourrait transformer la chaîne de valeur des matières premières congolaises, particulièrement stratégiques à l’heure de la transition énergétique mondiale.
Le port de Banana représente également un levier de développement social pour la RDC. En plus des emplois directs, il sera générateur d’un écosystème économique complet autour des activités portuaires : transport, logistique, services, formation… Autant de secteurs qui bénéficieront d’un transfert de compétences et d’une modernisation de leurs pratiques.
Pour une nation où le taux de chômage atteint des sommets, particulièrement chez les jeunes, cette perspective constitue une lueur d’espoir tangible.
Il serait toutefois naïf de considérer ce projet sous le seul angle de la philanthropie économique. Le Portugal, comme l’ensemble des investisseurs impliqués, y trouve naturellement son compte.
Ancienne puissance coloniale en Afrique, Lisbonne cherche à réinventer sa relation avec le continent en jouant la carte de la coopération économique et technique.
Dans un contexte de compétition internationale exacerbée pour l’accès aux ressources africaines – où la Chine a pris une longueur d’avance considérable – ce projet permet au Portugal de repositionner ses entreprises sur un marché d’avenir.