Après quatorze années de travaux, et pour relancer son économie en crise, l’Éthiopie a inauguré, le 9 septembre dernier, le barrage de la Renaissance (ou GERD selon l’acronyme anglais), plus large barrage hydraulique du continent.
Le calendrier ne doit rien au hasard puisque plusieurs chefs d’État se trouvaient déjà à Addis-Abeba la veille pour l’ouverture de la deuxième édition du Sommet de l’Afrique sur le climat.
Les présidents djiboutien, sud-soudanais, somalien, kényan, eswatinien ainsi que le chef de la Commission de l’Union africaine se sont ensuite envolés avec le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, en direction de la région du Benishangul-Gumuz, où une véritable ville a émergé autour du mégabarrage.
En doublant la production nationale d’électricité, ce géant, d’une capacité de 5 150 mégawatts, pourrait théoriquement permettre de relier au courant la moitié de la population qui en est encore privée.
Il devrait en outre rapporter un milliard de dollars par an à l’Éthiopie, en particulier grâce à l’électricité exportée à ses voisins.
Cependant, de nombreux freins empêchent le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique de renouer avec une croissance à deux chiffres, comme elle l’affichait fièrement au début du siècle.
« Le GERD seul ne permettra pas de retrouver une forte croissance dépassant les 10 %, tranche Dessalegn Chane. En revanche, il peut changer la donne en matière de développement, d’électrification et d’irrigation », précise ce parlementaire d’opposition, par ailleurs titulaire d’un doctorat en gestion intégrée des ressources en eau.
Contrairement aux récentes affirmations du président américain Donald Trump, le chantier, dont le coût a dépassé 5 milliards de dollars, a été financé par le gouvernement éthiopien, qui n’a pas hésité à appeler les citoyens en renfort.
« La plupart du temps, les employés ont volontairement cédé une partie de leur salaire, mais, dans certains cas, des responsables locaux ont pu obliger des fonctionnaires ou des agriculteurs à contribuer », explique Dessalegn Chane.
Selon le média qatari Al Jazeera, un accord technique a toutefois été signé secrètement entre l’Éthiopie et le Soudan dès 2022. Mais les tensions diplomatiques n’ont pas suffi à décourager Addis-Abeba, qui espère un effet boule de neige sur son économie à la peine après avoir été déclarée en défaut partiel de paiement en décembre 2023.
Les salaires très bas ne permettent pas aux diplômés de vivre de leur travail, comme l’ont rappelé les médecins, qui ont entamé une grève en mai. Un quart des jeunes sont au chômage et ce chiffre grimpe à 81 % dans la région septentrionale du Tigré, qui se remet péniblement de deux ans de guerre.