Depuis plusieurs décennies en Afrique ou ailleurs, l’énergie nucléaire fait figure d’option stratégique pour répondre à des besoins croissants en électricité tout en limitant les émissions de gaz à effet de serre.
Alors que de nombreux pays industrialisés ont développé des centrales à grande échelle dès le milieu du XXe siècle, le continent africain est longtemps resté en marge de cette technologie.
Les défis étaient multiples : infrastructures inexistantes, manque de cadres réglementaires adaptés, faible niveau de compétences locales dans les sciences nucléaires, et surtout, un coût d’investissement initial souvent jugé prohibitif.
Pourtant, la donne évolue rapidement. À l’heure où les exigences de sobriété carbone se combinent à une explosion de la demande énergétique, le nucléaire revient dans les débats, non plus comme une perspective lointaine, mais comme un levier concret de développement.
Un regain d’intérêt alimenté par les enjeux climatiques et industriels
Les coupures de courant répétées, les pénuries d’électricité dans les zones rurales, ou encore l’incapacité à alimenter des pôles industriels stratégiques sont autant de symptômes d’un continent à la recherche de solutions durables.
Dans ce contexte, les projets nucléaires retrouvent une place sur la table des décideurs. Ce n’est plus seulement la taille des réacteurs qui est envisagée, mais leur flexibilité : les petits réacteurs modulaires (PRM) et les microréacteurs (MR) gagnent en attractivité en raison de leur faible emprise au sol, de leur modularité et de leur relative simplicité d’installation.
Ces technologies séduisent de plus en plus d’investisseurs internationaux. Au-delà de l’enjeu énergétique, il s’agit aussi pour eux d’anticiper l’essor de marchés aujourd’hui sous-équipés mais en forte croissance.
L’énergie nucléaire apparaît ainsi comme un catalyseur potentiel pour la transformation économique de plusieurs pays africains, en soutenant à la fois la production industrielle, la numérisation croissante des services et les besoins des grandes agglomérations en expansion rapide.
La question du financement, nerf de la guerre
L’enthousiasme autour du nucléaire en Afrique se heurte toutefois à une réalité incontournable : le coût. Construire une infrastructure nucléaire, même de petite taille, nécessite des ressources financières importantes, des garanties à long terme et des mécanismes de gouvernance solides. C’est pour cette raison que les regards se tournent vers des partenariats internationaux, tant publics que privés.
Le récent Sommet africain sur l’innovation dans l’énergie nucléaire, organisé à Kigali, a mis en lumière l’émergence de nouvelles alliances dans ce domaine.
Des institutions de financement du développement, des opérateurs techniques, ainsi que des États prêts à coopérer ont affiché leur intérêt pour accompagner les pays africains dans la mise en œuvre de projets pilotes.
Le rôle des institutions régionales est également crucial, notamment pour harmoniser les cadres réglementaires et faciliter l’accès aux marchés à travers des mécanismes comme l’AFCFTA (Zone de libre-échange continentale africaine).
Le sommet a également insisté sur la formation des ressources humaines, enjeu central pour éviter une dépendance prolongée à l’expertise extérieure. L’idée de créer des pôles de compétence régionaux, soutenus par la mobilité des étudiants et chercheurs, commence à faire son chemin.
Le nucléaire, s’il veut devenir une réalité durable en Afrique, devra être accompagné par une politique cohérente d’éducation scientifique et technique.