Niger : les autorités haussent le ton ; des dizaines de maisons détruites près de Niamey

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Crédits photo : Iwaria / AMISOM

Au passage des bulldozers dans la périphérie de Niamey au Niger, des dizaines de maisons, de villas luxueuses et d’immeubles, s’écroulent comme des châteaux de cartes, sur décision des autorités : ces habitations ont été illégalement construites dans un massif forestier, censé protéger la capitale nigérienne de l’avancée du désert.

Issus de différentes classes sociales, ces habitants sont notamment attirés par la qualité de vie et la facilité d’acquisition de terrains à des coûts plutôt raisonnables, achetés à des sociétés immobilières privées, loin des lourdeurs administratives que demande la municipalité à Niamey et du délai d’attente qui atteint parfois des années.

Depuis le début de l’opération fin juin, toujours en cours, certains propriétaires assistent le visage défait aux destructions. D’autres, prennent les devants et s’empressent d’emporter tout ce qui peut l’être : portails, fenêtres, tôles, câbles électriques, petits châteaux d’eau potable, caméras de surveillance…

« Du nerf, du nerf, ils s’approchent », crie Hamissou Issiakou, un jeune homme, à des ouvriers qui peinent à arracher un énorme portail, guettant les forces de l’ordre.

« Nous avons chèrement acheté nos terrains, finalement, c’est un vrai gâchis », lance-t-il à l’AFP.

Le Niger détient l’un des taux de croissance démographique les plus élevés au monde et Niamey, qui s’étend, compte plus d’un million et demi d’habitants contre 750.000 en 2005, selon l’Institut national de la statistique.

Mais la « ceinture verte », comme l’appelle l’Etat qui l’a achevée en 1993, est aujourd’hui longue de 25 kilomètres et large de 1.000 mètres, après avoir perdu plus de la moitié de sa superficie à cause de l’urbanisation.

Plus loin, thermos à la main, Aboul-Razak Moussa distribue du café aux ouvriers qui déterrent à coups de barre à mine des pavés dans la cour de son immeuble, fraîchement construit.

« J’ai acheté le terrain à 12 millions de francs CFA (plus de 18.000 euros) et j’ai investi 127 millions de francs CFA (1,9 million d’euros) pour construire mon immeuble, nous remettons tout à Allah! », se résigne M. Moussa, patron d’une entreprise de soudure.

Les terrains sont vendus par des agences immobilières privées, rapportent les habitants.

Ali Hamza, un commerçant, s’indigne : « on est en pleine saison de pluies, ce n’est pas humain », vocifère ce père de dix enfants.

En tout, au moins 4.000 personnes ont été expulsées et près de 500 maisons au total vont être démolies, en majorité des taudis, selon les autorités.

Les riverains ont reçu un préavis de deux semaines pour quitter les lieux.

Changement climatique

Aux côtés des habitations, parkings, stations d’essence, pharmacies, centres de soins, magasins et déchetteries, ont poussé ces dernières années dans la ceinture verte.

Ce projet, achevé en 1993 et sans lien avec la Grande muraille verte (GMV) de l’Union africaine qui vise également à lutter contre l’avancée du désert, répond à plusieurs enjeux environnementaux.

Au Niger, dont la partie nord est située sur la bande du Sahara, le changement climatique engendre une hausse des températures, 1,5 fois plus rapide au Sahel que dans le reste du monde, ainsi que des épisodes de sécheresse et des inondations meurtrières.

Il est ainsi « impératif » que le Niger « préserve davantage les espaces verts », soutient Sani Ayouba, responsable de l’ONG Jeunes volontaires pour l’environnement (JVE).

Depuis 2004, « des décrets interdisent des logements dans la ceinture », a rappelé à la télévision publique le colonel des Eaux et Forêts Yacouba Seybou et une loi punit les contrevenants de 3 mois à 2 ans de prison, mais rien n’a stoppé son déclin.

« D’anciens ministres » avaient « autorisé des lotissements privés », accuse Boubacar Maman, un responsable au ministère de l’Urbanisme.

Le ministère nigérien de l’Environnement assure lui qu’un parc zoologique et aquatique, un jardin botanique ainsi qu’une aire de sports et de loisirs seront bientôt créés au sein du petit poumon vert.

© Agence France-Presse

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