Au Niger, l’armée a annoncé une importante victoire contre Boko Haram. En effet, les forces de défense ont indiqué avoir éliminé un chef de l’organisation terroriste. Ce qui pourrait changer l’équilibre des forces dans la région du lac Tchad.
Concrètement, les Forces armées nigériennes (FAN) ont informé ce jeudi 21 août 2025 avoir neutralisé Ibrahim Mahamadou, surnommé « Bakoura ».
Ce dirigeant était à la tête de la faction JAS de Boko Haram, l’une des plus dangereuses de la région. L’opération s’est déroulée le 15 août 2025 sur l’île de Chilawa, dans la région de Diffa, selon Apanews.
L’état-major nigérien explique que cette frappe résulte de « plusieurs semaines de surveillance minutieuse ». Les militaires ont suivi les mouvements du chef terroriste avant de passer à l’action.
L’intervention s’est déroulée en deux étapes.
D’abord, un avion de reconnaissance a confirmé la position des cibles. Ensuite, un chasseur-bombardier a effectué « trois frappes successives et précises » dans la matinée. Ce qui a permis de limiter les risques pour les soldats au sol.
Un cadre dans le terrorisme
Ibrahim Mahamadou était un vétéran du terrorisme. Il avait rejoint Boko Haram il y a plus de dix ans, rappelle l’armée nigérienne.
Cet homme de quarante ans était d’abord lieutenant d’Abubakar Shekau, l’ancien chef suprême de Boko Haram.
En mai 2021, Bakoura a pris la direction de la faction JAS après le suicide de Shekau.
Le précédent leader s’était donné la mort alors qu’il fuyait l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP) dans la forêt de Sambisa. JAS signifie Jama’atu Ahlis Sunna Lidda’Awati Wal-Jihad, une branche de Boko Haram.
Sous la direction de Bakoura, JAS a intensifié ses attaques. Le groupe a visé les civils et les forces de sécurité dans le bassin du lac Tchad.
Les autorités nigériennes lui reprochent notamment l’enlèvement de plusieurs centaines d’écoliers à Kuriga, au Nigeria, en mars 2024.
Le dernier rapport de l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions, publié le 24 juillet 2025, confirme l’importance de cette faction. Le document désigne la faction Bakoura Doro comme « la plus active au sein de Boko Haram ». Elle a étendu son contrôle territorial, particulièrement autour de la rivière Komadougou Yobé dans l’État de Borno.
Cependant, les experts appellent à la prudence. Vincent Foucher, spécialiste de l’insurrection jihadiste au Nigeria, rappelle que « par le passé, la mort de nombreux chefs jihadistes de la région du lac Tchad a été annoncée prématurément ». Les confusions sont fréquentes à cause des homonymies, comme pour Shekau qui avait été déclaré mort plusieurs fois.
À ce jour, la faction JAS n’a publié aucune réaction officielle concernant le sort de son dirigeant.
Selon Vincent Foucher, Bakoura était une figure centrale pour JAS. « Il a réussi à restructurer la faction après la mort de Shekau, à relancer l’offensive contre ISWAP, à reconquérir du terrain et à préserver l’autonomie de JAS », explique le chercheur.
Beaucoup s’attendaient à une absorption par ISWAP, mais Bakoura l’a empêchée.
L’expert souligne aussi que JAS a élargi ses activités sous son commandement. Le groupe opère maintenant au-delà du nord-est nigérian, notamment dans le nord-ouest avec le groupe de Sadikou.
Les conséquences de cette disparition restent incertaines. Vincent Foucher note que le leader « s’était imposé par la violence », éliminant le premier successeur de Shekau.
« JAS connaît des tensions internes plus marquées qu’ISWAP, ce qui accroît les risques de fragmentation », analyse-t-il.