À Niamey, capitale du Niger, de lourdes accusations viennent de tomber à l’encontre des propriétaires de stations-service chargées de vendre le carburant.
Ils sont accusés de fournir du carburant aux terroristes. C’est une grave accusation compte tenu de la situation sécuritaire délétère du pays depuis plusieurs années. Et ce, en raison des attaques terroristes sur la quasi-totalité du territoire.
C’est donc une crise inédite qui secoue présentement le secteur de la distribution de carburant au Niger du général Tiani. Dans un pays déjà fragilisé par l’insécurité, les autorités nigériennes viennent, en effet, de porter des accusations particulièrement graves contre les propriétaires de stations-service de la capitale. Le cœur du problème est clair : l’approvisionnement présumé de groupes terroristes en carburant depuis Niamey, un acte qualifié par les autorités de véritable trahison nationale.
Lors d’une réunion avec les promoteurs de stations-service, le gouverneur de la région de Niamey, le général Assoumane Abdou Harouna, a fait une déclaration fracassante relayée par Télé Sahel : « Nous avons la preuve que près de 60 % du carburant vendu aux terroristes part de Niamey. Et si ça part de Niamey, ça part de vos stations ». Une accusation directe qui cible l’ensemble du secteur, dans un contexte sécuritaire particulièrement tendu où les groupes armés multiplient les attaques sur le territoire nigérien.
L’autorité régionale s’appuie sur des données qu’elle qualifie de précises. Sur les 339 stations implantées dans la capitale, seules 54 disposeraient d’un promoteur clairement identifié auprès des services administratifs. Cette opacité faciliterait, selon les autorités, l’établissement d’une chaîne logistique illicite au profit des groupes terroristes opérant dans les zones dites « rouges » du pays.
Le gouverneur a rappelé l’existence d’un arrêté ministériel datant de 2023 qui interdit formellement la vente de plus de 50 litres de carburant en bidon. Une mesure préventive qui semble avoir été largement contournée par certains opérateurs, motivés selon les autorités par l’appât du gain au détriment de la sécurité nationale.
« C’est comme si vous buviez le sang de la population nigérienne », a lancé le général Harouna aux professionnels du secteur, usant d’une formule particulièrement forte pour souligner la gravité des faits reprochés.
Des sanctions ont déjà été appliquées contre plusieurs stations. Le gouverneur a notamment évoqué le cas de la station Ola, située sur la route de Torodi, fermée récemment après avoir été prise en flagrant délit d’acheminement de carburant vers une zone sous influence terroriste.
« Il y a eu quelques stations qui ont été fermées par le gouverneur. Vous savez bien pourquoi », a-t-il déclaré, précisant que ces fermetures étaient toujours étayées par des preuves tangibles, parfois même documentées par des photographies.
Face à cette situation jugée préoccupante, les autorités nigériennes ont décidé de durcir considérablement les contrôles. Un ultimatum d’un mois a été donné à l’ensemble des exploitants pour installer des caméras de surveillance dans leurs établissements. Ces dispositifs devront être de qualité suffisante pour permettre l’identification précise des personnes et des transactions suspectes. « Celui qui, au bout d’un mois, n’installe pas de caméra de surveillance dans sa station, on ferme la station jusqu’à nouvel ordre », a prévenu le gouverneur.
Ces enregistrements seront accessibles non seulement aux propriétaires mais également au Conseil régional de sécurité (CRS), à la police, à la gendarmerie et à la garde nationale, qui pourront les consulter à tout moment. Un dispositif qui traduit la volonté des autorités d’exercer un contrôle renforcé sur l’ensemble de la chaîne de distribution du carburant.
Le gouverneur a par ailleurs souligné la responsabilité directe des propriétaires concernant les agissements de leurs employés : « Vous avez le devoir de savoir ce que font vos pompistes. C’est vous qui les avez choisis, parce que vous leur faites confiance ». Il a averti que la responsabilité pénale des promoteurs pourrait être engagée en cas de récidive, avec des sanctions pouvant aller jusqu’à des peines d’emprisonnement pour « complicité avec l’ennemi ».
« La sécurité, c’est l’affaire de tout le monde, civil comme militaire », a terminé le général Harouna, appelant les acteurs du secteur pétrolier à contribuer à l’effort national en « vendant de l’honneur et du bon sens » plutôt qu’en privilégiant des profits illicites qui menacent directement la stabilité du pays.