L’État ivoirien face aux défis de l’enseignement privé : 4 jours pour repenser un système

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Le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation (MENA) a organisé, du 26 au 29 août 2025 à Yamoussoukro, un atelier de réflexion sur la problématique de l’enseignement général dans le secteur privé. Une démarche qui interroge sur la qualité d’un système où l’État délègue une part substantielle de sa mission éducative.

Dans l’enceinte d’un hôtel de la capitale politique ivoirienne, les participants ont disséqué les maux d’un secteur qui accueille près d’un million d’élèves, mais peine à garantir une qualité constante. « Cet atelier se veut un creuset d’échanges, de réflexions, de propositions constructives et de partage d’expériences autour des thématiques cruciales pour l’amélioration du système et l’émergence de stratégies innovantes », avait déclaré Anastasie Kakou Sepou, Directrice de Cabinet adjointe, représentant la ministre Professeur Mariatou Koné.

Un partenariat public-privé aux multiples fragilités

L’éducation occupe une place prépondérante dans le développement national ivoirien. Mais l’État, incapable d’assumer seul cette tâche régalienne, s’appuie sur 3 008 établissements secondaires privés, dont 2 239 accueillent 987 638 élèves affectés par l’État. Une complémentarité devenue indispensable mais qui n’est pas sans heurts.

La liste des défis évoqués lors de cet atelier ressemble à un inventaire des maux chroniques : irrégularité et insuffisance des salaires, fraude aux examens à grand tirage, infrastructures d’accueil déficientes, enseignants parfois incompétents, instructions ministérielles ignorées, conventions caduques et établissements clandestins. Autant de symptômes d’un système où la recherche de profit peut primer sur la mission éducative.

Pour Touré née Diarra Mariam, Directrice de l’Encadrement des Établissements Privés (DEEP), cette activité s’inscrit dans une dynamique de dialogue social visant à améliorer un secteur miné par des difficultés structurelles.

Un atelier, quatorze recommandations

Ces trois jours d’intenses travaux ont rassemblé les représentants de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale, de la Direction Générale du Trésor, des fondateurs d’établissements privés et des syndicats des personnels. Un aréopage d’acteurs aux intérêts parfois divergents mais réunis autour d’un objectif commun : améliorer durablement la qualité de l’enseignement privé.

Les quatorze recommandations issues de l’atelier touchent à des enjeux fondamentaux : prise en charge des frais de transport et de restauration lors des formations pédagogiques, respect du Code du travail, mise en place d’un cadre permanent de concertation, formation au management et à la gestion financière, protection sociale des employés, revalorisation des salaires, strict respect du calendrier scolaire.

La question de la rémunération des enseignants et de leur protection sociale reste centrale. Le solde de la spéciale dévaluation et la révision de la convention collective entre fondateurs et personnels figurent parmi les revendications historiques enfin formalisées dans ce document.

Un chantier qui s’inscrit dans une réforme plus vaste

Cette initiative s’inscrit dans un contexte plus large de transformation du système éducatif ivoirien. En effet, la Cellule d’Appui et de Coordination à la Réforme Éducative (CAC-RE), créée en 2023 à la suite des États Généraux de l’Éducation, pilote actuellement plusieurs chantiers d’envergure : digitalisation de l’enseignement, modernisation de la formation des enseignants, déploiement d’une plateforme de Suivi-Évaluation.

Pour 2025, les ambitions sont élevées avec notamment la généralisation du numérique dans l’enseignement et l’amélioration de la qualité pédagogique. Des objectifs qui rejoignent les préoccupations exprimées lors de l’atelier de Yamoussoukro.

Cette rencontre intervient également quelques semaines après l’annonce des résultats du baccalauréat 2025, dont le taux d’admission a atteint 40,15%, en hausse de 5,98% par rapport à 2024. Une amélioration qui reste à confirmer dans le temps et à répartir plus équitablement entre public et privé.

À l’heure où la Côte d’Ivoire ambitionne d’accélérer son développement, la qualité de son système éducatif, public comme privé, constitue un enjeu stratégique. L’atelier de Yamoussoukro n’est qu’une étape dans un processus de réforme qui devra transformer les recommandations en actions concrètes. Le dialogue est ouvert, reste à le transformer en progrès tangibles pour les élèves et les enseignants.

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