Dans un geste qui ne manquera pas de soulever des sourcils aux États-Unis et à la France, les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) s’apprêtent à développer un satellite, avec le soutien inattendu de la Russie.
Le Mali, le Niger et le Burkina Faso, membres de l’AES, envisagent en effet de développer un satellite de communication commun en collaboration avec l’agence spatiale de la Russie, ROSCOSMOS, au grand dam de la France et des États-Unis.
Ce projet ambitieux, discuté lors d’une réunion ministérielle à Bamako le 23 septembre, vise à révolutionner les télécommunications dans la région sahélienne.
Selon Alousséni Sanou, ministre malien de l’Economie et des Finances, ce satellite permettra d’améliorer significativement la connectivité dans les zones reculées, offrant des services Internet haut débit et des communications sécurisées.
L’initiative intervient dans un contexte où les pays de l’AES accusent un retard notable en matière de télécommunications. Avec 66,97 millions d’abonnés à la téléphonie mobile pour une population de 80,9 millions d’habitants, et seulement 17,2 millions d’utilisateurs d’Internet au début de l’année 2024, le potentiel de croissance est considérable.
Les pays de l’AES, loin d’être le premier pion damé par la Russie aux États-Unis et à la France
La Russie n’en est pas à son coup d’essai en Afrique. En octobre 2022, elle a déjà collaboré avec l’Angola pour le lancement d’AngoSat-2, un satellite de télécommunications dont la commercialisation a débuté en janvier 2023.
Les résultats sont probants : en un an, l’Angola a vu le nombre de ses utilisateurs d’Internet passer de 11,78 à 14,63 millions, tandis que les abonnements mobiles ont bondi de 20,1 à 29,2 millions.
Cette coopération spatiale entre l’AES et la Russie s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu. Elle illustre la volonté des pays sahéliens de diversifier leurs partenariats, au risque de froisser leurs alliés traditionnels occidentaux.
Pour Moscou, c’est l’opportunité de renforcer son influence en Afrique, dans un domaine hautement stratégique.
Si le projet aboutit, il pourrait transformer radicalement le paysage des télécommunications au Sahel. Mais au-delà des avancées technologiques, c’est bien un nouveau chapitre des relations internationales qui s’écrit, où l’Afrique s’affirme comme un terrain d’influence disputé entre les grandes puissances.