Au Nigéria, membre important de la CEDEAO, la Commission nigériane de lutte contre les crimes économiques et financiers (EFCC) vient de faire un coup à plusieurs centaines de milliards.
Et pour cause, l’institution vient d’annoncer avoir récupéré près de 500 millions de dollars, soit l’équivalent de 762 milliards de nairas ou 301 milliards de francs CFA, de fonds détournés.
C’est un résultat sans précédent qui traduit à la fois l’ampleur du fléau et la détermination nouvelle des autorités à lutter contre ce dernier.
Il faut savoir que cette réussite est due à une stratégie initiée sous l’administration du président Bola Tinubu.
Le Nigeria, première puissance économique d’Afrique et poids lourd de la CEDEAO, affronte depuis des décennies ce mal systémique qui mine son développement en siphonnant les milliards de l’économie.
Les 4 000 condamnations pénales obtenues parallèlement par l’EFCC constituent un record absolu depuis la création de cet organisme il y a plus de vingt ans.
La nature des biens saisis dessine une cartographie précise des mécanismes de prédation à l’œuvre dans le pays.
Au-delà des simples liquidités, ce sont plus de 900 000 tonnes de produits pétroliers qui ont été récupérées, confirmant que l’or noir, principale ressource nationale, demeure au cœur des convoitises.
Le patrimoine immobilier n’est pas en reste, avec près d’un millier de propriétés confisquées, auxquelles s’ajoutent des portefeuilles d’actions témoignant de la sophistication croissante du blanchiment.
Une partie de ces actifs a été réaffectée à des projets d’intérêt public. Une manière de transformer ce qui fut soustrait à la collectivité en instruments de son développement, tout en tentant de restaurer une confiance citoyenne érodée par des années de malversations.
Pourtant, ces résultats impressionnants ne doivent pas masquer l’ampleur du défi qui persiste. Le Nigeria occupe toujours le 140ᵉ rang sur 180 dans le classement de Transparency International, une position qui traduit la profondeur des racines du problème.
La lutte contre la corruption dans ce pays de la CEDEAO s’apparente à un combat contre l’hydre : pour chaque tête coupée, combien repoussent dans l’ombre ?
Cette situation n’est pas sans écho dans d’autres nations africaines comme le Soudan du Sud, la Somalie ou la Libye, où l’instabilité politique nourrit les détournements massifs. Le Nigeria, malgré ses institutions plus solides, peine encore à établir des garde-fous efficaces et durables.
Les sommes récupérées, si impressionnantes soient-elles, ne représentent probablement que la partie émergée d’un iceberg dont les dimensions réelles restent difficiles à évaluer.
Selon certains experts, les détournements annuels au Nigeria pourraient représenter plusieurs milliards de dollars, engloutissant des ressources cruciales pour l’éducation, la santé et les infrastructures.
L’EFCC, sous la direction d’Ola Olukoyede, semble déterminée à intensifier ses efforts. Mais la véritable bataille se jouera sur le terrain des réformes structurelles : transparence des marchés publics, indépendance renforcée de la justice, protection effective des lanceurs d’alerte.
Sans ces changements profonds, les 762 milliards de nairas récupérés pourraient n’être qu’une victoire éphémère dans une guerre de longue haleine.