En 2024, le Niger et le Rwanda ont affiché les taux de croissance les plus élevés de la région. Ce sont là les propos d’Amadou Nicolas Racine Sy, économiste et conseiller du directeur dans le département Afrique du Fonds Monétaire International (FMI).
A la faveur d’une interview accordée à l’Agence Ecofin, l’expert revient sur les perspectives économiques revisées d’avril 2025 pour l’Afrique subsaharienne.
Ci-dessous, l’intégralité de son interview :
« En 2024, le Niger et le Rwanda ont affiché les taux de croissance les plus élevés de la région. D’autres pays, comme le Bénin, l’Éthiopie, la République démocratique du Congo, la Guinée, le Sénégal et l’Ouganda, ont enregistré des croissances supérieures à 6 % ».
À l’inverse, les pays avec une croissance inférieure à 2 % incluent le Botswana, la République centrafricaine, le Tchad, la Guinée équatoriale, Sao Tomé-et-Principe, l’Afrique du Sud, le Soudan du Sud et le Zimbabwe. Les pays riches en ressources naturelles, notamment les exportateurs de pétrole, affichent une croissance faible. Cependant, il y a des signes positifs : le Nigeria, par exemple, a atteint 3,4 % de croissance en 2024, grâce à une production d’hydrocarbures plus élevée et un secteur des services dynamique. Cela montre qu’il faut analyser les performances pays par pays.
Agence Ecofin : Revenons à l’Afrique subsaharienne. Cette croissance semble insuffisante pour répondre aux besoins de près de 900 millions de personnes. De plus, elle manque d’inclusivité, comme le FMI le souligne souvent, avec des revenus nationaux bruts réduits par les déficits commerciaux, le remboursement de la dette et la rémunération des capitaux investis. Comment le FMI collabore-t-il avec les gouvernements pour préserver cette faible valeur ajoutée au sein des économies locales ?
Amadou Sy : La région a besoin d’une croissance plus rapide et inclusive pour améliorer le niveau de vie, et nous pensons que c’est réalisable. Le FMI travaille avec les gouvernements sur trois priorités. Premièrement, rétablir et soutenir la stabilité macroéconomique, une condition nécessaire. Dans des contextes d’inflation élevée ou de volatilité monétaire, les décisions économiques deviennent complexes. Cette stabilité doit être calibrée selon les déséquilibres et les contraintes politiques de chaque pays.
Deuxièmement, faire de la politique budgétaire un levier d’inclusion. Côté recettes, il y a une marge pour augmenter les recettes fiscales de manière équitable, en améliorant l’administration fiscale plutôt qu’en augmentant les taux d’imposition. Côté dépenses, il faut renforcer la protection sociale et les services publics, tout en hiérarchisant les investissements. Une stratégie budgétaire à moyen terme, soutenue par un cadre institutionnel solide, peut réduire les coûts économiques et sociaux des ajustements.
« Côté recettes, il y a une marge pour augmenter les recettes fiscales de manière équitable. Côté dépenses, il faut renforcer la protection sociale et les services publics. »
Troisièmement, accélérer les réformes structurelles pour une croissance durable et inclusive. Le secteur privé doit jouer un rôle moteur en améliorant le climat des affaires et la gouvernance. Pour les pays dépendants des ressources naturelles, comme l’Angola où 90 à 95 % des exportations reposent sur le pétrole, il faut lever les obstacles à la diversification. Ces réformes nécessitent une communication avec les parlements et la société civile pour garantir leur mise en œuvre.