Le Congo et l’Angola, deux pays africains aux frontières étroitement liées, ont décidé de se rapprocher pour limiter les brouillages télécoms aux frontières.
En harmonisant l’usage des fréquences, ils espèrent mettre fin aux brouillages qui nuisent aux communications dans les zones frontalières et protéger un bien invisible mais vital : la stabilité du réseau.
Les fréquences sont le souffle invisible qui donne vie aux services télécoms. Elles transportent nos voix, nos messages et nos images d’un point à l’autre du globe.
Pourtant, lorsqu’elles s’échappent au-delà des limites tracées sur une carte, elles peuvent semer la confusion et brouiller la connexion. Du 5 au 7 août 2025, à l’ombre des négociations discrètes mais cruciales, des délégations venues du Congo et de l’Angola se sont retrouvées autour d’une même table pour harmoniser l’usage de ces ondes dans leurs zones frontalières.
Sous l’égide de l’Autorité de régulation des postes et des communications électroniques du Congo (ARPCE), les deux parties ont convenu de paramètres précis pour sept bandes de fréquences, allant de 700 MHz à 3 500 MHz. Leurs engagements sont concrets : limiter la couverture réseau à 1 000 mètres au-delà des frontières, bannir les antennes omnidirectionnelles dans ces zones sensibles et fermer les points de vente opérant en marge de la réglementation. Autant de mesures pensées pour que chaque pays protège son espace sans étouffer celui de son voisin.
Cette initiative n’est pas isolée. Elle s’inscrit dans une dynamique régionale qui prend de l’ampleur. Quelques jours avant, le 4 août 2025, le Gabon et le Cameroun scellaient un accord similaire. Ces dernières années, l’ARPCE a multiplié les partenariats : avec la RDC en 2021, puis avec le Gabon en 2023, et des discussions sont en cours avec le Cameroun. Dans toute la sous-région, les signaux se multiplient : en juin dernier, le Tchad et le Cameroun se sont rencontrés pour aborder la même question, et en août 2024, un accord tripartite a été annoncé entre le Cameroun, le Gabon et la Guinée équatoriale.
Car les ondes, elles, ne connaissent pas de frontières. Selon l’Union internationale des télécommunications (UIT), elles franchissent sans effort les lignes imaginaires qui séparent les États. Leur gestion concertée est donc essentielle : elle garantit un accès équitable aux ressources spectrales, évite les zones « mortes » ou les bandes inutilisées, et prévient les brouillages qui peuvent réduire la qualité des communications.
L’histoire a montré les conséquences d’une mauvaise coordination. Dans les années 2000, les signaux venus du Cameroun ont envahi N’Djamena, la capitale tchadienne. Les opérateurs camerounais MTN et Orange, installés à Kousséri, avaient inondé le marché tchadien de téléphones et cartes SIM à bas prix, fragilisant les jeunes réseaux CELTEL et LIBERTIS. Après sept ans de tensions et l’intervention de l’UIT, un accord avait finalement été signé en 2009 pour mettre fin à ce déséquilibre.
Aujourd’hui, même si l’accord Congo–Angola n’est pas encore formalisé, sa signature semble proche. Mais comme souvent dans ces domaines, la réussite se mesurera à l’épreuve des faits : il faudra veiller à ce que les engagements se traduisent par des actions concrètes sur le terrain.
En s’alliant à un autre pays africain pour mieux gérer ses fréquences frontalières, le Congo envoie un signal fort : celui d’une Afrique qui apprend à conjuguer ses ressources, à parler d’une seule voix technique et à protéger l’espace invisible qui relie ses peuples. Car derrière chaque appel sans grésillement et chaque connexion fluide se cache une coopération patiemment tissée.