Le Canada lance la construction d’une série de réacteurs miniatures pour éclairer 1,2 million de foyers.
À Darlington, en Ontario, les pelleteuses sont prêtes pour entamer un chantier d’un nouveau genre avec le premier “petit” réacteur nucléaire modulaire construit pour un pays du G7 (la Russie, toujours elle, devance le G7 dans ce domaine).
Ce nouveau “joujou technologique”, baptisé BWRX-300, ne paie pas de mine mais peut alimenter jusqu’à 300 000 logements à lui seul !
Et ce n’est qu’un début : quatre de ces unités sont prévues sur le site. Une fois en service, elles devraient générer 1 200 mégawatts, de quoi fournir l’électricité à 1,2 million de foyers canadiens.
L’initiative, portée par Ontario Power Generation (OPG) et GE Vernova Hitachi Nuclear Energy (GVH), a reçu le feu vert du gouvernement provincial. Elle attire déjà les regards du Royaume-Uni, des États-Unis, de la Pologne et de la Suède.
Canada : les réacteurs nucléaires à eau bouillante, une technologie déjà bien éprouvée
Le BWRX-300 repose sur une technologie qui a fait ses preuves depuis ses débuts dans les années 50 : celle des réacteurs à eau bouillante (BWR). Ce qui change dans le cas présent, c’est la taille et la standardisation.
En miniaturisant les composants et en privilégiant un modèle reproductible, les ingénieurs misent sur la rapidité de construction et la réduction des coûts.
Concrètement, le BWRX-300 est un SMR (Small Modular Reactor dans la langue de Shakespeare) conçu pour produire 300 mégawatts d’électricité, soit un tiers de la puissance d’un réacteur classique comme ceux de Gravelines ou de Tricastin.
Il utilise de l’uranium commercial, facile à se procurer, et s’intègre dans une logique modulaire : on peut en installer plusieurs, en parallèle, selon les besoins.
Les avantages des SMR
L’atout majeur de ces petits réacteurs, c’est leur modularité industrielle. En répétant le même schéma de construction, les opérateurs comme OPG peuvent espérer :
- accélérer les délais de livraison (quelques années contre une décennie en moyenne pour une centrale classique),
- réduire les coûts grâce aux effets d’échelle,
- maîtriser les risques techniques en misant sur une technologie déjà connue.
Craig Ranson, président de GE Vernova Hitachi Nuclear Energy, explique : « Grâce à la standardisation du BWRX-300, chaque réacteur supplémentaire devient plus simple à construire, plus rapide à connecter au réseau, et donc plus rentable. »
L’Ontario anticipe une hausse de la demande énergétique d’ici le début des années 2030. Plusieurs centrales à charbon vont fermer, et les besoins augmentent avec l’électrification des transports ou des procédés industriels.
Le plan de l’OPG consiste à éviter une rupture d’approvisionnement et à garantir une production d’électricité bas-carbone, pilotable, qui ne dépend ni du soleil ni du vent. Dans ce contexte, le nucléaire compact devient une solution de transition, entre les énergies fossiles en fin de vie et les renouvelables encore trop intermittents.
Le Canada, loin d’être sans arrière pensée géopolitique, veut aussi exporter sa technologie. L’enjeu est d’importance : devenir référence mondiale dans les réacteurs compacts, au moment où l’Europe et l’Amérique du Nord cherchent à réduire leur dépendance aux importations russes ou chinoises.
Le PDG de GE Vernova, Scott Strazik, est formel : « Ce projet prouve que le nucléaire peut encore innover, produire sans carbone et répondre aux attentes de demain. »
En effet, si l’expérience de Darlington se révèle convaincante, d’autres pays pourraient copier le modèle, et passer commande.