L’Afrique va dédier 2 787 milliards à ces ressources

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Le Maroc vient d’accueillir la signature d’un accord qui place l’énergie et l’eau au centre des stratégies de développement africain. La Banque Africaine de Développement et ACWA Power ont scellé un partenariat financier à la hauteur des besoins du continent. Cinq milliards de dollars américains seront déployés d’ici 2030, soit environ 2 787 milliards de francs CFA. Une somme destinée à financer des projets de production électrique et de dessalement.

L’accord a été paraphé en marge du Forum d’investissement en Afrique qui s’est tenu fin novembre dans la capitale marocaine. Les deux institutions se fixent pour objectif d’accélérer la transition énergétique et d’améliorer l’accès à l’eau potable à travers le continent. Le document porte essentiellement sur l’évaluation et le soutien de projets d’énergies renouvelables, de dessalement d’eau et de production électrique raccordée aux réseaux. L’Afrique subsaharienne concentre l’essentiel des efforts prévus.

Hashim Ghabashi préside les opérations africaines d’ACWA Power. Il considère le continent comme un marché incontournable pour son entreprise. « Ce cadre de coopération avec la Banque Africaine de Développement est un témoignage de notre engagement indéfectible envers l’Afrique », a-t-il déclaré. Le président a ajouté que ce partenariat accélèrera la capacité du groupe à concrétiser des projets transformateurs dans les domaines de l’énergie et de l’eau.

La coopération intègre aussi une dimension environnementale et sociale. Les deux partenaires entendent respecter les standards internationaux en matière de développement durable et d’impact social. Cette ambition s’aligne sur le programme « Mission 300 », lancé conjointement par la BAD et le Groupe de la Banque mondiale. Enfin, un projet qui vise à connecter 300 millions de personnes à l’électricité en Afrique subsaharienne d’ici 2030.

Actuellement, près de 600 millions d’habitants de cette zone géographique vivent sans accès à l’électricité. Ce déficit représente environ 83 % de la population mondiale privée d’énergie. Le programme « Mission 300 » mobilise plusieurs partenaires de développement, dont la Banque mondiale qui s’engage à raccorder 250 millions de personnes, tandis que la BAD en fera de même pour 50 millions supplémentaires.

ACWA Power opère déjà dans quatorze pays à travers le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord, l’Afrique du Sud, l’Asie centrale et l’Asie du Sud-Est. La société saoudienne, basée à Riyad depuis 2004, emploie plus de 4 000 personnes dans le monde. Son portefeuille comprend 101 projets en exploitation, en développement ou en construction, représentant une valeur totale de 403 milliards de riyals saoudiens, soit environ 107,5 milliards de dollars américains. Ces installations génèrent une capacité de 78,9 gigawatts d’électricité et 9,5 millions de mètres cubes d’eau dessalée par jour.

Le géant énergétique intervient déjà en Afrique de l’Ouest. Au Sénégal, il pilote le plus grand projet de dessalement d’eau de mer de la sous-région, entièrement alimenté par des énergies renouvelables. Cette usine de la Grande-Côte doit garantir jusqu’à 400 000 mètres cubes d’eau potable par jour pour Dakar et sa région. L’investissement total atteint 800 millions de dollars américains.

Le projet sénégalais a connu des rebondissements. Bref, des négociations tendues entre le nouveau gouvernement et ACWA Power en 2024 ont abouti à une renégociation du contrat initial signé sous l’ancienne présidence. Le nouveau partenariat public-privé prévoit une réduction des engagements financiers de l’État : 17,5 milliards de francs CFA par an entre 2027 et 2029, puis 35 milliards à partir de 2030, contre respectivement 20 et 40 milliards dans l’ancien contrat.

La capacité de production solaire associée au projet double également, passant de 150 à 300 mégawatts-crête. L’énergie excédentaire sera vendue à la SENELEC à 18 francs CFA par kilowattheure. Cette modification contribue à réduire le coût global de l’eau dessalée tout en générant des revenus supplémentaires pour la société nationale d’électricité.

Au Maroc, ACWA Power a remporté plusieurs contrats dans le solaire. Le groupe a décroché les projets Noor I, II, III et IV, ainsi que Noor Midelt. Ces centrales thermiques et photovoltaïques transforment le paysage énergétique marocain. Le royaume chérifien mise sur les énergies renouvelables pour diversifier son mix énergétique et réduire sa dépendance aux combustibles fossiles.

Le nouvel accord signé à Rabat permet d’amplifier cette dynamique à l’échelle continentale. Les infrastructures de production électrique et les usines de dessalement nécessitent des investissements colossaux et des partenariats solides. La BAD apporte sa connaissance des contextes africains, sa capacité à mobiliser des financements concessionnels et son réseau institutionnel. ACWA Power met sur la table son expertise technique, son expérience opérationnelle et sa capacité à structurer des partenariats public-privé.

Les défis restent immenses. L’accès à l’eau potable demeure problématique dans plusieurs régions africaines. Les prélèvements d’eau devraient augmenter de 60 % d’ici 2035, selon les projections de la Banque mondiale. Le dessalement offre une solution alternative aux ressources en eau douce, déjà sous pression. Cette technologie coûte cher, mais les innovations et l’énergie solaire permettent de réduire progressivement les tarifs de production.

Le partenariat BAD-ACWA Power s’étend jusqu’en 2030. Cinq années pour identifier, développer et financer des dizaines de projets à travers le continent. La réussite dépendra de la capacité des gouvernements à réformer leurs secteurs énergétiques, à garantir la viabilité financière des compagnies d’électricité et à créer un environnement attractif pour les investisseurs privés. Les deux partenaires comptent également sur la mobilisation d’autres bailleurs, notamment les organisations philanthropiques et les fonds climatiques.

L’accord signé à Rabat marque un engagement financier quantifié, assorti d’un calendrier précis. Reste à traduire ces promesses en centrales électriques, en usines de dessalement et en kilomètres de réseaux de distribution. Le continent a besoin de résultats concrets, pas seulement d’annonces. Les 300 millions d’Africains ciblés par « Mission 300 » attendent d’allumer une ampoule, de recharger un téléphone, d’accéder à l’eau courante. Ces gestes quotidiens, banals ailleurs, transforment des vies ici.

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