Air France a véritablement des soucis à se faire en Afrique, comme le montre l’ambition affichée par les pays de l’AES.
En effet, l’Alliance des États du Sahel (AES) fait montre d’une stratégie audacieuse visant à réduire la dépendance historique vis-à-vis des compagnies occidentales, Air France en tête.
Cette initiative pourrait assurément redessiner la carte du transport aérien en Afrique de l’Ouest. Toutefois il convient de noter qu’elle soulève des questions sur sa viabilité économique.
Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, membres de l’AES, s’engagent dans une démarche singulière. Plutôt qu’une compagnie unique, chaque État développe son propre pavillon national.
Air Burkina a déjà repris son envol avec l’acquisition d’un Embraer 190, tandis que Mali Airlines prend forme à travers une ordonnance adoptée mi-novembre.
Cette stratégie, si elle peut paraître paradoxale dans un contexte d’union, traduit une volonté farouche d’indépendance.
Le timing de cette initiative n’est pas anodin. Alors qu’Air France traverse une période de restructuration de ses lignes africaines, surtout son absence dans les trois pays membres, l’AES saisit l’opportunité de combler un vide stratégique.
Les nouvelles compagnies nationales visent principalement les liaisons régionales, jusqu’ici dominées par les transporteurs étrangers. Une approche qui pourrait, à terme, fragiliser la position historique d’Air France dans la région.
Cependant, les défis sont considérables. Le marché ouest-africain, déjà saturé par de multiples acteurs comme Asky, Air Peace ou Air Côte d’Ivoire, voit sa rentabilité menacée par une concurrence accrue.
Les géants du Golfe et Ethiopian Airlines, disposant de moyens colossaux, n’ont cessé de renforcer leur présence.
Dans ce contexte, la multiplication des pavillons nationaux au sein de l’AES pourrait paradoxalement fragiliser leur position collective.
L’histoire récente du transport aérien africain incite à la prudence. Les exemples d’Air Sénégal ou de Kenya Airways montrent qu’un soutien étatique constant est souvent nécessaire pour maintenir ces compagnies à flot.
Allan Kilavuka, PDG de Kenya Airways, plaide d’ailleurs pour une consolidation régionale plutôt qu’une multiplication des acteurs.