Les députés de la Russie ont entériné en troisième lecture une loi prévoyant la punition des recherches sur Internet de contenus classés « extrémistes », malgré l’opposition d’une soixantaine de parlementaires, et accentuant encore plus la répression en cours.
Quelques heures avant le vote, plusieurs militants et une journaliste du quotidien russe « Kommersant » ont été arrêtés pour avoir participé à une action de protestation contre cette loi devant le siège de la Douma, la chambre basse du Parlement, a constaté l’AFP sur place.
L’opposant Boris Nadejdine, qui voulait défier Vladimir Poutine à la dernière présidentielle en mars 2024, mais dont la candidature a été finalement rejetée par le pouvoir, avait annoncé cette manifestation.
Mais la mairie de Moscou l’a aussitôt interdite au prétexte de « la situation épidémiologique provoquée par la coronavirus », un motif régulièrement utilisé par les autorités pour empêcher des rassemblements.
La loi, qui doit encore être adoptée par la chambre haute et être signée par le président Vladimir Poutine, prévoit des amendes pouvant aller jusqu’à 5.000 roubles (environ 55 euros) pour les personnes qui recherchent des contenus « extrémistes » en ligne.
La Douma a adopté le texte avec 306 voix pour, 67 contre et 22 abstentions. Deux groupes parlementaires ont voté contre.
« Les gens ne veulent pas de cette loi », a ainsi lancé le vice-président de la Douma Vladislav Davankov, membre du parti « Nouvelles personnes », la seule formation au Parlement d’orientation libérale, en appelant les élus à s’y opposer.
Le représentant du Parti communiste Artiom Prokofiev a également critiqué le projet qui prévoit de punir les internautes « juste pour avoir pris connaissance » d’une information sur internet classée « extrémiste ».
Le président de la Douma Viatcheslav Volodine a, lui, fermement défendu la loi, arguant qu’elle permettrait de s’opposer en Russie à « des plateformes en ligne occidentales, entre les mains de pays inamicaux, qui ont également lancé des sanctions contre nous ».
« L’Occident agit durement et cyniquement contre la Russie en livrant des armes à l’Ukraine (…) avec le seul but de détruire et d’éliminer notre pays », a-t-il ajouté pour défendre la loi.
Mais pour Boris Nadejdine, interrogé par l’AFP, le nouveau texte « punira le crime de pensée comme dans le roman 1984 » de l’écrivain britannique George Orwell.
Il explique qu’en vertu de cette loi une personne qui chercherait en ligne « qui était (l’opposant) Alexeï Navalny », déclaré extrémiste et mort en prison en février 2024, pourrait recevoir une amende.
La Russie restreint de manière drastique la liberté de la presse et la liberté d’expression sur internet depuis le lancement de son offensive en Ukraine en 2022, en se focalisant de plus en plus sur des plateformes internationales comme Google, Facebook, Youtube et X.
La définition de ce qui est « extrémiste » est très large dans la législation russe et peut concerner tant des groupes terroristes ou ultranationalistes que des opposants politiques ou mouvements religieux.
Avec AFP