Le Sénat kényan devait commencer ce mercredi 9 octobre 2024 l’examen de la destitution du vice-président Rigathi Gachagua, accélérant le processus vers sa possible révocation, au lendemain d’un vote de l’Assemblée nationale.
Cette procédure inédite contre le n°2 de l’Etat, lancée le 1er octobre par un député de la coalition présidentielle (Kenya Kwanza), marque le point culminant de plusieurs mois de conflit entre le président William Ruto et son adjoint, au pouvoir depuis leur victoire à la présidentielle d’août 2022.
Le Sénat avait sept jours pour se saisir de ce dossier, mais l’a placé à l’ordre du jour de sa session de mercredi, quelques heures à peine après un vote de l’Assemblée nationale.
Il doit désormais se prononcer dans un délai maximum de dix jours.
Mardi soir, les députés ont approuvé, par 282 voix sur 349, une motion demandant la destitution de M. Gachagua sur la base de onze motifs dont ceux d »atteinte à l’unité nationale », d »insubordination » envers le président ainsi que de nombreuses suspicions de « crimes économiques » (détournements de fonds publics, conflits d’intérêts, abus de pouvoir…).
Rigathi Gachagua, 59 ans, a promis de se battre « jusqu’au bout » contre cette procédure qu’il a qualifiée de « pure propagande » et de « complot visant à (le) chasser du pouvoir », avec l’approbation du chef de l’Etat.
Le président Ruto, qui est resté silencieux sur le sujet, avait choisi M. Gachagua comme colistier pour la présidentielle d’août 2022, malgré sa réputation sulfureuse, déjà marquée par plusieurs accusations de corruption.
Doté d’un solide réseau d’influence notamment dans la région stratégique du Mont Kenya, cet homme politique de l’ethnie kikuyu (majoritaire dans le pays) a joué un rôle crucial dans la victoire de M. Ruto face à son rival Raila Odinga.
Mais les relations entre les deux hommes à la tête de l’Etat se sont détériorées notamment depuis un mouvement de contestation antigouvernementale qui a secoué le pays en juin et juillet.
Les détracteurs de M. Gachagua l’accusent de ne pas avoir soutenu le chef de l’Etat face aux manifestations qui demandaient sa démission. La répression de ce mouvement a fait plus de 60 morts.
Le vice-président s’estime depuis mis à l’écart par le président, qui a en revanche commencé à se rapprocher du Mouvement démocratique orange (ODM) de M. Odinga.
En cas d’adoption, il serait le premier vice-président écarté du pouvoir via cette procédure, instaurée dans la Constitution de 2010. Mais il pourrait contester la décision en justice.
En 1989, le vice-président Josephat Karanja avait démissionné dans des conditions similaires, avant un vote de défiance l’accusant de saper l’autorité du président Daniel arap Moi.
© AVEC AFP