Kenya : face au risque d’inondations, le gouvernement prend une décision radicale qui fait des victimes

rupture d'un barrage

Crédit photo : France 24

Depuis plusieurs semaines, le Kenya connaît de fortes pluies qui ont causé des inondations dévastatrices, faisant 257 morts, détruisant ponts, routes et maisons et déplaçant des dizaines de milliers de foyers.

Face à l’ampleur des dégâts, le président William Ruto a ordonné le 30 avril l’évacuation de toutes les personnes vivant dans les zones à risque d’inondations. Ces évacuations se feront « de gré ou de force », a prévenu ce weekend le porte-parole du gouvernement Isaac Mwaura.

Mercredi, à Mukuru, l’un des plus grands bidonvilles de la capitale kényane, une pelleteuse a entrepris un travail de démolition sur les bords de la rivière du même nom, écrasant de son bras mécanique les toits de tôle et balayant les fragiles structures de bois ou de briques, sous les yeux des habitants.

Certains s’empressent de récupérer les feuilles de tôle jetées au sol, dans l’espoir de se reconstruire un toit un peu plus loin ou de gagner quelques shillings en les revendant; d’autres fouillent les débris à la recherche d’effets personnels.

« Ils sont arrivés soudainement avec leurs pelleteuses« , raconte Catherine Masai: « Ils ont démoli nos maisons sans nous donner d’endroit où aller« .

« Le gouvernement a tort »

Les bidonvilles, où les habitations informelles poussent dans l’anarchie, sont particulièrement exposés au risque d’inondations.

A Mathare, autre bidonville des faubourgs est de Nairobi, une crue éclair du cours d’eau qui traverse le quartier a emporté des maisons construites sur les berges, faisant au moins 13 morts le 24 avril.

A Mukuru, la rivière locale a aussi débordé. Mais Catherine Masai n’en démord pas.

« Nous vivons ici depuis plus de 30 ans sans avoir été emportés par des inondations. Si ça avait été le cas, on ne pourrait pas vivre ici », affirme la quinquagénaire : « Nous sommes restés parce que nous étions bien. Ceux qui se sentaient menacés par les inondations sont déjà partis.« 

« Le gouvernement a tort de nous mettre dehors« , estime-t-elle, pas convaincue par les explications du président Ruto qui a affirmé que les « évacuations » des populations vivant dans les zones à risque étaient faites « pour leur sécurité« .

« Nous pouvons les protéger ailleurs« , a déclaré lundi le chef de l’Etat lors d’une visite à Mathare, en assurant: « Il y aura assez de nourriture, il y aura des couvertures, il y aura des matelas et nous allons nous occuper de leurs enfants« .

Le chef de l’Etat a promis que chaque foyer déplacé recevrait la somme de 10.000 shillings kényans (environ 70 euros).

Mais à Mukuru, Sheila Mbone affirme n’avoir reçu aucune information sur l’endroit où elle serait relogée.

« Le gouvernement démolit nos maisons sans nous dire où nous allons être relogés« , explique la jeune femme de 20 ans : « Que sommes-nous censés faire en tant que victimes ?« 

Avec AFP