Les députés français ont approuvé jeudi en première lecture une proposition de loi visant à restreindre la fabrication et la vente de produits contenant des PFAS, des polluants éternels, excluant toutefois du périmètre de la loi les ustensiles de cuisine, après une forte mobilisation cette semaine des fabricants.
Massivement présentes dans la vie courante (poêles en Téflon, emballages alimentaires, textiles, automobiles…), ces substances per- et polyfluoroalkylés appelés PFAS (prononcer « pifasse ») doivent leur surnom à leur cycle de vie très long et, pour certaines, à leur effet néfaste sur la santé.
Adoptée à l’unanimité en commission la semaine dernière, la proposition de loi présentée par l’écologiste Nicolas Thierry, a fait l’objet de vifs débats entre la gauche et le camp présidentiel, et, plus feutrés, entre le gouvernement et la majorité.
Il a finalement été approuvé à l’unanimité, avec 186 voix pour et zéro contre.
L’article principal du texte prévoit d’interdire à partir du 1er janvier 2026 la fabrication, l’importation et la vente de tout produit cosmétique, produit de fart (pour les skis) ou produit textile d’habillement contenant des substances per- et polyfluoroalkylées, à l’exception des vêtements de protection pour les professionnels de la sécurité et de la sécurité civile.
L’ensemble des textiles seront concernés par l’interdiction à compter du 1er janvier 2030.
L’application de l’interdiction aux ustensiles de cuisine, initialement prévue dans le texte, a été supprimée par les députés en séance, plusieurs élus de droite, d’extrême-droite et de la majorité se montrant sensibles aux arguments des fabricants concernant les risques pour l’emploi.
La majorité avait proposé de repousser l’interdiction concernant ces produits de 2026 à 2030. Report jugé trop important par les écologistes, qui ne voulaient pas aller au-delà de 2027. La majorité a répliqué en supprimant purement et simplement l’alinéa de la discorde, faisant vivement réagir à gauche.
« Encore une fois », la majorité alliée à la droite et à l’extrême droite a « cédé aux lobbying (du fabricant) Seb, au détriment de la santé des français. C’est une honte », ont réagi les députés écologistes.
Le fabricant français d’électroménager SEB, qui avait sonné l’alarme cette semaine sur la menace qu’une telle loi ferait peser sur quelque 3.000 emplois dans deux de ses usines qui fabriquent notamment les poêles Tefal, s’est dit « rassuré que la science et la raison l’aient emporté aujourd’hui dans l’hémicycle », par la voix d’une porte-parole.
Des PFAS « non dangereux » ?
Le gouvernement voulait aller au-delà de cette exclusion des produits culinaires, et a soutenu des amendements de la droite et de certains dans son camp visant à supprimer l’article principal de la loi, mais il n’a pas été suivi par sa majorité.
Comme le Premier ministre, Gabriel Attal, mercredi, le ministre de l’Industrie Roland Lescure a défendu devant les députés la nécessité d’agir au niveau européen pour interdire l’usage de certains PFAS, en s’inscrivant dans le cadre du règlement européen sur les produits chimiques Reach.
« Des restrictions ont déjà été mises en place (en Europe) et des interdictions seront prônées, prononcées dans de brefs délais », a argumenté M. Lescure, en écartant en revanche l’idée d’une interdiction générale.
En particulier le polytétrafluoroéthène (PTFE) qui est utilisé pour les poêles « est très vraisemblablement un des PFAS qui sera jugé comme non dangereux » par l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), a-t-il plaidé.
Il a rappelé le soutien de la France à la démarche de cinq pays européens qui ont déposé un dossier auprès de cette agence en vue d’un projet d’interdiction large des PFAS, et a évoqué un plan d’action contre ces polluants éternels présenté jeudi par le gouvernement.
Mais pour le rapporteur Nicolas Thierry, le projet de restriction au niveau européen est « nécessaire » mais « pas suffisant », face au caractère « massif » de l’exposition aux PFAS et au « sérieux risque pour la santé ».
Parmi les autres mesures de son texte adoptées dans l’hémicycle, l’application du principe pollueur-payeur avec une taxe visant les industriels qui en rejettent – malgré l’opposition du gouvernement. Ou encore l’obligation de contrôler la présence de PFAS dans l’eau potable sur tout le territoire.
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