« Débureaucratiser » la vie des entreprises ou, comme l’a résumé la ministre déléguée aux Entreprises Olivia Grégoire, « enlever les cailloux dans les chaussures de nos entrepreneurs, pas en semer » : le Sénat a commencé lundi 03 juin 2024 à examiner le projet de loi de simplification de la vie économique, parfois avec un certain scepticisme.
Bulletin de paie simplifié, formulaires Cerfa supprimés, « tests PME » pour évaluer les normes avant leur mise en place… Les sénateurs prendront au moins trois jours pour examiner le texte en première lecture, avant un vote solennel prévu mardi 11 juin 2024.
Rares sont les dispositions très politiques dans ce texte censé faciliter la vie des entreprises, ce qui laisse envisager une adoption sans grandes difficultés par les sénateurs, malgré l’opposition de la gauche.
« Il ne peut y avoir, d’un côté, la Chine et les États-Unis qui simplifient à outrance et, de l’autre, l’UE qui ne cesse d’ajouter des normes », martèle régulièrement le ministre de l’Economie Bruno Le Maire, qui a laissé la main aux ministres délégués de Bercy, et particulièrement à Mme Grégoire, sur ce texte.
Rendez-vous annuel
Le projet prend particulièrement en compte la situation des petites entreprises : « Nous ne sommes pas tous égaux face à la norme, selon que vous soyez une petite PME de 10 salariés ou une grosse (entreprise) avec une équipe dédiée », a relevé Mme Grégoire.
Il sera question notamment de rapprocher le droit des professionnels et celui des particuliers en matière de banque et d’assurance.
Les débats s’annoncent techniques sur de nombreux pans de la vie économique (contentieux de la commande publique, code minier, installations industrielles)…
« C’est un petit texte par rapport à son ambition. Le gouvernement fera sans nul doute des déçus », estime la sénatrice Les Républicains Catherine Di Folco, corapporteure sur ce texte.
Les frustrations sont néanmoins atténuées par la promesse gouvernementale de poursuivre ce vaste chantier régulièrement, avec un projet de loi annuel.
La gauche, elle, est encore plus sceptique. Le socialiste Michaël Weber craint notamment un « texte en trompe-l’œil » au détriment des enjeux environnementaux. Particulièrement ciblée par la gauche, une mesure qui assouplit les modalités de compensation environnementale des nouveaux projets industriels, pour faciliter leur implantation.
Toutes les sensibilités s’alignent en revanche pour dénoncer la mesure emblématique du plan : la mise en place d’un bulletin de paie raccourci, passant de 55 lignes à seulement une quinzaine.
Le texte comprend une partie technique que le Sénat a supprimée en commission, le reste devant passer par la concertation avec les partenaires sociaux.
« C’est de la communication ou de la cosmétique. Je n’ai pas croisé une seule personne qui m’a dit que c’était une bonne idée », s’agace le centriste Yves Bleunven, l’autre corapporteur. Bercy tentera de faire rétablir son article en séance publique.
Habilitations
Autre mesure-choc, la suppression à l’horizon 2030 des 1.800 formulaires Cerfa et le passage au peigne fin des 2.500 autorisations administratives qui alourdissent le quotidien des entreprises.
Une partie de ce travail de fourmi ne passera pas par la loi. Mais pour le reste, le gouvernement souhaite avoir les mains libres et demande aux parlementaires de larges habilitations à réformer par ordonnances, ce qui irrite les sénateurs.
« On cherche à contourner le Parlement », alerte Rémy Pointereau (LR).
Cette simplification des procédures du quotidien « est le nerf de la guerre » a plaidé Mme Grégoire, observant que faire passer toutes ces suppressions par la loi « serait un exercice titanesque ». « Le gouvernement vous rendra des comptes » sur ce chantier, a-t-elle cependant promis.
L’instauration de tests PME, un mécanisme visant à évaluer en amont l’impact de toutes les normes sur les entreprises, permettra en revanche au Sénat de réintroduire un dispositif déjà voté en son sein, avec l’approbation du gouvernement.
L’initiative gouvernementale est globalement appréciée par les organisations patronales. Le Medef, par exemple, « soutient l’esprit » du texte, qui néanmoins « n’épuise pas l’ensemble du chantier de simplification ».
Avec l’AFP
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