Face au coup de massue d’une surtaxe punitive de 39% sur les produits suisses importés aux États-Unis, le gouvernement helvétique veut utiliser les quelques jours de répit laissés par Donald Trump pour tenter d’arracher des concessions pour une économie très dépendante de l’export.
Le taux très élevé par rapport à des pays concurrents de la Suisse – comparé par exemple aux 15% qui doivent être imposés aux produits de l’UE – semble avoir pris les autorités par surprise, d’autant qu’initialement les Américains avaient évoqué une surtaxe de 31%.
Mais le déficit commercial de plusieurs dizaines de milliards de dollars a incité le président américain – qui y voit un signe de faiblesse des États-Unis – à frapper encore plus fort, malgré un ultime coup de fil jeudi 31 juillet 2025 avec la présidente de la confédération, Karin Keller-Sutter et un projet de déclaration commune d’intention.
Les droits de douane additionnels doivent entrer en vigueur le 7 août 2025.
« La Suisse était et reste en contact avec les services compétents des USA. Elle aspire toujours à trouver une solution négociée qui soit compatible avec l’ordre juridique suisse, engagements internationaux compris », écrit vendredi 01 août 2025 le Conseil fédéral sur le réseau social X, qui fait part de son « grand regret » devant la décision américaine.
Cette annonce intervient le jour de la Fête nationale suisse.
Les responsables suisses avaient multiplié les discussions avec Washington pour tenter de trouver un terrain d’entente, en vain.
« Le déficit commercial reste au centre » des préoccupations du président américain avait reconnu la présidente sur le réseau social X le soir du jeudi 31 juillet 2025.
– Conséquences à long terme –
Dans une première réaction, des industriels suisses ont exhorté vendredi 01 août 2025 le gouvernement fédéral à poursuivre les négociations mais aussi à améliorer la compétitivité des entreprises exportatrices.
L’association professionnelle des entreprises du secteur mécanique, électrique et des métaux, Swissmem souligne que ces surtaxes frappent « extrêmement durement l’industrie technologique, fortement orientée vers l’exportation » et mettent « en danger plusieurs dizaines de milliers d’emplois ».
« La Suisse gagne un franc sur deux grâce au commerce extérieur. La prospérité de tous est en danger », souligne l’association dans un communiqué.
Les États-Unis sont un partenaire clé pour le petit pays alpin de 9 millions d’habitants. En 2024, ils représentaient 18,6% de ses exportations de marchandises, selon les relevés des douanes.
Il s’agit principalement de produits pharmaceutiques – qui représentent 60% de toutes les exportations suisses vers les États-Unis –, de livraisons de l’industrie tech (machines, équipements électriques et métaux) pour environ 20% et de montres (8%).
Le secteur pharmaceutique est à priori exempté des droits punitifs mais Donald Trump a exhorté l’ensemble de ses acteurs (pas seulement les Suisses) à baisser les prix des médicaments sous peine de représailles.
Le déficit du commerce des biens des États-Unis avec la Suisse a approché les 40 milliards de francs suisses en 2024 (43 milliards d’euros).
La Suisse est cependant le 6e pays en termes d’investissements directs aux Etats-Unis, particulièrement dans la recherche et le développement.
Ainsi Roche et Novartis, les deux géants suisses de la pharmacie ont annoncé ces derniers mois des dizaines de milliards de dollars d’investissements aux Etats-Unis sur les cinq prochaines années.
Quant à l’économie suisse, elle pourrait voir le PIB s’éroder de 0,3 à 0,6 point de pourcentage, selon le Centre de recherches conjoncturelles de l’École polytechnique fédérale de Zurich, KOF, cité par l’agence Keystone-ATS.
Si le secteur pharmaceutique devait être lui aussi touché l’addition serait beaucoup plus salée.
– Vives réactions politiques –
La droite radicale de l’Union du centre (UDC), le premier parti de Suisse dont certains thèmes de prédilection et parfois le ton font penser au style de Donald Trump, appelle à réduire les impôts et les taxes, diminuer la bureaucratie et à lever certaines réglementations. Le parti, vent debout contre tout rapprochement avec l’UE, estime qu’adopter « la bureaucratie monstrueuse et toutes les réglementations de l’UE » serait « stupide ».
Le parti socialiste tire la conclusion inverse et souligne que « dans un monde où les acteurs les plus puissants agissent de manière imprévisible, il est essentiel de faire corps avec des partenaires fiables », une position également défendue par les Verts-Libéraux et les Vert-e-s.
Le Parti-Libéral-radical (centre droit) critique Donald Trump qui « agit à l’encontre de tous les principes » que les libéraux-radicaux et les démocraties occidentales défendent.
Avec AFP