Des avions des États-Unis de Donald Trump sillonnent le ciel du Nigeria. Les données de suivi des vols révèlent des passages quotidiens au-dessus du territoire.
Washington a déployé ces moyens aériens après les menaces d’intervention militaire formulées par Donald Trump contre Abuja. Le président américain accuse les autorités nigérianes de ne pas protéger les communautés chrétiennes.
L’appareil concerné appartient à Tenax Aerospace, société basée dans le Mississippi qui collabore étroitement avec l’armée américaine. Ce Gulfstream V, un jet d’affaires longue distance modifié pour les missions de renseignement, décolle généralement d’Accra avant de survoler le Nigeria puis de regagner la capitale ghanéenne.
Les données montrent que l’avion était stationné le 7 novembre à la base aérienne de MacDill en Floride, quartier général du commandement des opérations spéciales américaines. Il a rejoint le Ghana le 24 novembre, quelques jours après une rencontre entre responsables sécuritaires américains et nigérians.
Liam Karr, responsable de l’équipe Afrique au Critical Threats Project de l’American Enterprise Institute, a analysé ces mouvements aériens. Selon lui, l’opération est coordonnée depuis Accra, plaque tournante connue du réseau logistique militaire américain sur le continent. Karr estime que ces vols témoignent d’une reconstruction des capacités américaines dans la région. Le Niger avait expulsé l’an dernier les troupes américaines d’une base nouvellement construite dans le désert, préférant se tourner vers la Russie.
Enfin, les objectifs précis de ces missions restent flous. Un ancien responsable américain a confirmé que l’avion fait partie de plusieurs équipements transférés au Ghana par l’administration Trump en novembre. Les missions incluent la recherche d’un pilote américain enlevé au Niger et la collecte de renseignements sur les groupes armés actifs au Nigeria. Boko Haram et sa branche dissidente, l’État islamique en Afrique de l’Ouest, figurent parmi les cibles de cette surveillance. Un responsable en poste a confirmé les survols mais a refusé de donner des détails, invoquant la sensibilité diplomatique du dossier.
Trump avait posté en novembre sur les réseaux sociaux : « Si le gouvernement nigérian continue d’autoriser le massacre des chrétiens, les États-Unis cesseront immédiatement toute aide au Nigeria, et pourraient bien entrer dans ce pays désormais déshonoré, pistolets au poing, pour éliminer complètement les terroristes islamiques. » Le président a ensuite demandé au département de la Défense de préparer une intervention militaire rapide si Abuja ne met pas fin aux violences.
Le Nigeria conteste cette lecture des événements. Les autorités affirment que les groupes armés s’attaquent aussi bien aux musulmans qu’aux chrétiens. Bref, la situation sécuritaire serait trop complexe pour être réduite à une persécution religieuse. Le pays a néanmoins accepté de coopérer avec Washington. Une source sécuritaire nigériane a indiqué que les deux pays ont convenu lors d’une réunion le 20 novembre entre Nuhu Ribadu, conseiller à la sécurité nationale, et Pete Hegseth, secrétaire à la Défense américain, de déployer des moyens aériens pour collecter du renseignement.
Le président Bola Tinubu a déclaré le mois dernier l’état d’urgence sécuritaire. Il a ordonné des recrutements massifs dans l’armée et la police pour faire face à la recrudescence des violences. Cette décision fait suite à des attaques meurtrières dans plusieurs États et à l’enlèvement de plus de 300 écoliers dans le nord du pays. Washington a de son côté replacé le Nigeria en octobre sur la liste des pays violant la liberté religieuse. Cette semaine, Abuja a été ajouté à la liste des pays soumis à des restrictions d’entrée sur le territoire américain.