États-Unis-Allemagne : une alliance inédite pour « co-produire » des drones de nouvelle génération

États-Unis-Allemagne : une alliance inédite pour "co-produire" des drones de nouvelle génération

Crédit photo : https://baykartech.com/en/press/

Une alliance inédite entre les États-Unis et l’Allemagne va permettre de « co-produire » des drones de nouvelle génération.

En effet, « trois entreprises américaines ont récemment conclu des partenariats avec l’industrie allemande pour « co-produire » des drones de nouvelle génération. Une opportunité industrielle qui n’est pas sans risques en matière de souveraineté », selon BFM TV.

L’Allemagne est en passe de devenir la « plaque tournante » pour concevoir les futurs drones accompagnateurs d’avions de combat… mais ils seront de conception américaine. Depuis quelques semaines, les annonces se sont succédées autour d’accords de partenariat conclus entre des producteurs de drones américains et des industriels allemands.

Anduril a ouvert le bal en plein Salon du Bourget au mois de juin, en annonçant avoir signé un accord avec le conglomérat allemand Rheinmetall, pour produire des drones de combat et des missiles. Présenté comme un « partenariat stratégique », l’accord prévoit en particulier de développer une version européanisée du drone de combat Fury. Cet engin a été baptisé YFQ-44A par l’US Air Force, qui envisage de le faire voler aux côtés de l’avion de combat F-35, et plus tard, l’avion de 6ème génération F-47.

Puis, mi-juillet, c’est au tour d’Airbus d’annoncer la signature d’un accord avec l’américain Kratos: le partenariat est basé sur l’exploitation du drone XQ-48A Valkyrie conçu par Kratos, auquel Airbus viendrait intégrer ses propres systèmes de mission (capteurs, etc.). L’avionneur européen annonce vouloir en faire un appareil « prêt au combat » dès 2029, avec l’ambition d’en équiper l’armée de l’air allemande.

Un jour plus tard, General Atomics, un poids lourd du secteur (il équipe déjà l’armée de l’air et de l’espace avec des MQ-9 Reaper), dégaine à son tour et révèle une collaboration avec sa filiale allemande, General Atomics Aerotec Systems, pour « la livraison rapide d’un drone européen de combat collaboratif », qui sera un dérivé de son prototype YFQ-42A – auquel il ajouterait des systèmes de missions de conception européenne.

L’essor des « drones accompagnateurs »

L’objectif est clair : se positionner sur le marché allemand, dans un premier temps, avant d’élargir à d’autres pays européens. Le patron de Rheinmetall Armin Papperger, a déclaré à des analystes début août que le besoin des forces armées allemandes était estimé à environ 400 aéronefs de ce type.

Baptisés « CCA », pour « collaborative combat aircraft » (avion de combat collaboratif), ces aéronefs ont également été appelés effecteurs déportés (« remote carriers ») ou encore « loyal wingman » (ailier fidèle). Ce type de drones, qui vont être conçus pour des missions de largage de munitions rôdeuses, de bombes ou de missiles, font partie intégrante des systèmes de combats aérien futurs qui sont actuellement développés par différents pays (SCAF franco-germano-espagnol, GCAP anglo-italo-nippon, NGAD américain).

En France, Dassault Aviation poursuit le développement de son démonstrateur technologique nEUROn, qui accompagnera le futur Rafale dans ses missions, et à plus longue échéance, peut-être le futur avion de combat européen. Airbus avait présenté en 2024 son drone de combat Wingman, pour accompagner les Eurofighter. Plus récemment, le constructeur espagnol Indra a levé le voile sur son propre CCA, estampillé « 100% espagnol », le Valerio, dont les premiers développements ont débuté en 2023. Un autre acteur à vocation européenne, la société germano-franco-britannique Helsing, pourrait également s’inviter dans cette nouvelle guerre des drones.

Danger ou opportunité pour la souveraineté européenne?

Ces partenariats germano-américains présenteraient l’avantage pour l’industrie allemande de bénéficier de la force de frappe américaine et de technologies déjà développées ou en cours de développement, mais à l’inverse, peuvent aussi engendrer un certain degré de dépendance vis-à-vis du fournisseur du système principal – à savoir le drone.

Dans l’optique où ces partenariats seront effectivement mis en œuvre, ils pourraient permettre d’acquérir du matériel plus rapidement, la majeure partie des travaux de développement ayant déjà été réalisée côté américain. En revanche, le drone étant de conception américaine, il n’échappera sans doute pas à la réglementation ITAR (International traffic in arms regulations), un dispositif de contrôle mis en place par les États-Unis pour réguler (et restreindre) les exportations et réexportations de matériels militaires.

Conçue initialement pour protéger l’industrie américaine et préserver la supériorité technologique, la réglementation ITAR « limite également la flexibilité opérationnelle des pays alliés », peut-on ainsi lire dans un rapport de l’IFRI sur les relations transatlantiques entre les bases industrielles et technologiques de défense.

Politique de confidentialité

Selon les co-auteurs Léo Péria-Peigné et Élie Tenenbaum, « pour les États européens, la conformité au système ITAR se traduit souvent par une dépendance politique, les États-Unis conservant un droit de véto sur la manière et le lieu de déploiement de leurs systèmes. »

« En minimisant son exposition à l’ITAR, l’Europe peut rationnaliser ses processus d’approvisionnement, renforcer sa souveraineté opérationnelle et garantir sa liberté d’agir de manière indépendante dans les conflits futurs », énoncent les auteurs, qui concluent en évoquant la nécessité d’une stratégie commune à long terme pour atteindre « une véritable autonomie industrielle ».

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