Économie : le Gabon subit un coup dur en provenance des États-Unis

‎Gabon Fitch

Crédit Photo : GSEZ

L’agence américaine Fitch Ratings a abaissé vendredi la note souveraine du Gabon, la faisant passer de CCC à CCC- pour la dette en devises étrangères. Une dégradation encore plus sévère frappe la note en monnaie locale, désormais établie à CC contre CCC auparavant.

Cette décision place le pays d’Afrique centrale dans une zone à haut risque de défaut de paiement, compliquant davantage l’accès aux financements internationaux et régionaux.

Les raisons invoquées par Fitch sont multiples. L’agence pointe l’élargissement des déficits budgétaires, l’accès restreint au marché régional de la dette de la CEMAC et le poids écrasant des échéances d’amortissement. Bref, Libreville accumule les difficultés sur tous les fronts.

Les besoins de financement en monnaie locale atteignent des niveaux sans précédent, avec des remboursements prévus à hauteur de 8,0 % du PIB en 2026 et 7,2 % en 2027.

Derrière la dégradation annoncée par Fitch, une confiance érodée envers le Gabon sur le marché régional

L’appétit des investisseurs pour la dette gabonaise s’est considérablement affaibli depuis le second semestre 2024. Les enchères récentes ont révélé un désintérêt croissant, avec des ratios offre-demande tombés sous la barre des 50 %.

Le pays avait bénéficié au premier trimestre 2025 d’un traitement préférentiel accordé par la COBAC, régulateur bancaire de la zone CEMAC, avec une pondération de risque fixée à 0 %. Cette faveur terminée, la demande s’est effondrée.

Entre décembre 2024 et septembre 2025, les arriérés envers les créanciers officiels ont augmenté de 0,7 % du PIB. Ces retards de paiement atteignent désormais 165 milliards de francs CFA, soit 1,2 % du PIB.

La Banque mondiale avait d’ailleurs suspendu ses décaissements quelques jours avant l’annonce de Fitch, citant des arriérés de 17 milliards de francs CFA. Les arriérés domestiques envers les fournisseurs s’établissaient à 13,2 % du PIB fin 2024, un niveau alarmant qui s’est probablement aggravé en 2025.

Selon Fitch, le déficit budgétaire devrait se creuser à 6,1 % du PIB en 2025, contre 3,7 % en 2024. Cette expansion budgétaire reflète le changement de politique économique amorcé après le coup d’État d’août 2023.

La nouvelle administration, dirigée par le général Brice Oligui Nguema, a privilégié l’augmentation des dépenses publiques pour répondre aux pressions sociales. La masse salariale connaît une hausse de 7 % par an en 2024 et 2025, tandis que les dépenses d’investissement ont bondi de 40 % en 2024.

Une dette en trajectoire ascendante

La dette publique du Gabon devrait atteindre 80,4 % du PIB en 2025, contre 72,9 % en 2024. Fitch prévoit une poursuite de cette tendance, avec des projections à 85,5 % en 2026 et 86,7 % en 2027.

Enfin, ce niveau dépasse largement la médiane de 66 % observée pour les pays ayant une notation similaire. Le pays doit par ailleurs honorer 315 millions de dollars d’euro-obligations arrivant à échéance en juin 2025, après avoir racheté une partie de cette dette plus tôt dans l’année.

La dégradation intervient deux semaines après un remaniement ministériel qui a vu le départ de Mays Mouissi du ministère de l’Économie. L’ancien ministre, critiqué pour sa gestion dans un contexte de crise financière, a été transféré au ministère de l’Environnement et du Climat. Mark Alexandre Doumba, diplômé de Harvard et fondateur du holding CLIKAFRIK Group, a pris les rênes de l’Économie et des Participations le 15 janvier. Son profil d’entrepreneur et d’investisseur international suscite des attentes sur sa capacité à redresser les finances publiques.

La production pétrolière, qui constitue l’épine dorsale de l’économie gabonaise, continue son déclin progressif. Fitch anticipe une baisse des prix du pétrole, passant de 80 dollars le baril en 2024 à 70 dollars en 2025. Cette évolution aggrave les besoins de financement d’un pays où les revenus pétroliers représentent une part substantielle du budget. Les réserves de change de la CEMAC ont diminué, passant de 7 294 milliards de francs CFA fin 2024 à 6 667 milliards en août 2025, réduisant la couverture des importations à 4,3 mois contre 4,8 mois auparavant.

Continuez la discussion en temps réél !
Rejoignez notre chaîne WhatsApp