L’Égypte a annoncé dimanche 9 novembre 2025 la mise au jour d’un nouveau puits gazier dans le désert occidental. Le puits Badr-15 produit déjà. Seize millions de pieds cubes de gaz et 750 barils de condensats jaillissent chaque jour de ce forage exploité par Badr El-Din Petroleum Company, coentreprise entre l’Egyptian General Petroleum Corporation et Shell.
Les réserves récupérables atteignent quinze milliards de pieds cubes, d’après les estimations relayées par l’agence Xinhua.
Cette annonce survient à un moment où l’Égypte cherche à compenser le déclin de ses champs matures. Le pays consomme l’essentiel de sa production gazière pour alimenter ses centrales électriques. Près de 80 % de l’électricité égyptienne provient du gaz naturel. Or, la production locale a chuté de 15 % en 2023, selon les données disponibles.
Le gisement Zohr, présenté en 2015 comme un champ géant, déçoit. Les réserves prouvées, sept ans après sa mise en service, ne dépassent toujours pas 300 milliards de mètres cubes, alors que les estimations initiales atteignaient 850 milliards.
Face à cette situation, Le Caire a multiplié les forages. Le ministre du Pétrole, Karim Badawi, a révélé le 22 octobre dernier que dix-huit découvertes de pétrole et de gaz avaient été enregistrées entre juillet et octobre 2025. Treize d’entre elles sont déjà connectées au réseau. Ces nouveaux puits fournissent, selon lui, 44 millions de pieds cubes de gaz et 14 000 barils de pétrole et condensats par jour. Des volumes qui permettent de maintenir la production, mais sans inverser la tendance baissière.
Le puits Badr-15 ne va pas, à lui seul, changer la donne. Ses volumes restent modestes à l’échelle nationale. Mais il représente une pièce supplémentaire dans la stratégie d’intensification des forages lancée par les autorités. Le gouvernement égyptien table sur une campagne ambitieuse : 480 nouveaux puits d’ici 2030. Ce programme a été annoncé lors du World Energies Summit tenu en octobre 2025. Il s’appuie sur une intensification des campagnes sismiques et l’ouverture de nouveaux blocs à l’exploration.
Début novembre, l’Égypte a d’ailleurs attribué plusieurs blocs d’exploration offshore à BP, Eni et Chevron. Ces attributions visent à relancer l’activité dans les zones maritimes, notamment en mer Rouge où une nouvelle ronde d’appels d’offres internationale a été lancée lors de l’Abu Dhabi International Petroleum Exhibition and Conference tenue en novembre. Les trois majors pétrolières vont donc explorer de nouvelles zones avec l’espoir de découvertes plus substantielles que Badr-15.
Cette frénésie d’exploration découle d’une contrainte simple : le pays ne peut plus compter sur ses réserves actuelles. Longtemps exportateur, l’Égypte est devenue importatrice nette de pétrole vers 2010. La demande intérieure explose.
La population a atteint 116 millions d’habitants en 2024, contre 80 millions en 2010. La consommation électrique suit cette courbe démographique. Les infrastructures peinent à suivre. Des coupures de courant ont frappé le pays en 2024, alimentant le mécontentement populaire.
Bref, chaque nouveau puits compte. Les autorités tentent de maintenir une production suffisante pour éviter l’importation massive de gaz, qui pèse lourdement sur les finances publiques. L’Arabie Saoudite a suspendu ses livraisons de brut en 2016 après des désaccords géopolitiques concernant la Syrie et le Yémen. Le Caire doit donc diversifier ses approvisionnements et, surtout, maximiser sa production domestique.
Le pays mise aussi sur les énergies renouvelables. Les capacités solaires et éoliennes ont atteint 4,6 gigawatts en 2024, soit une hausse de 24 % par rapport à 2023. Cette capacité dépasse presque le double de celle fournie par les trois barrages sur le Nil. Mais le basculement vers les renouvelables prend du temps. Les centrales à gaz resteront dominantes pendant encore plusieurs années. D’où l’urgence de sécuriser les approvisionnements gaziers.
Enfin, l’Égypte poursuit également la construction de sa première centrale nucléaire à Dabaa, avec l’aide de la Russie. Le contrat, qui s’élève à 30 milliards de dollars, prévoit quatre réacteurs de type VVER-1200. La construction du premier réacteur a débuté en juillet 2022. Cette diversification énergétique devrait, à terme, réduire la dépendance au gaz. Mais elle n’aura pas d’effet immédiat. La centrale ne sera opérationnelle que dans plusieurs années.