La Côte d’Ivoire, géant incontesté du cacao, dresse de nouvelles barrières face aux étrangers qui dominent son secteur cacaoyer.
Alors que la campagne principale 2024-2025 s’achève sur une note positive avec une récolte estimée à 1,45 million de tonnes – en hausse par rapport aux 1,29 million de tonnes de l’année précédente – Abidjan entend en effet redistribuer les cartes d’un jeu longtemps favorable aux géants étrangers.
Ce qui va changer pour les étrangers sur le cacao de la Côte d’Ivoire
Le Conseil café cacao (CCC), gendarme inflexible de la filière, s’apprête à introduire une réglementation contraignante pour la campagne intermédiaire débutant en avril 2025.
Cette mesure obligera désormais les opérateurs à traiter intégralement dans leurs propres installations les fèves acquises, mettant fin au système de sous-traitance qui permettait aux plus grands acteurs d’étendre leur emprise sur le marché.
« Cette mesure, qui vise à protéger tous les acteurs en garantissant un accès équitable aux fèves, permettra d’éviter les positions dominantes », justifie-t-on au sein du régulateur, dans une déclaration qui ne masque guère la cible visée : les mastodontes étrangers qui trustent le top du classement des négociants.
L’Américain Cargill West Africa (170 000 tonnes) continue de dominer ce palmarès, suivi du Singapourien Olam (120 000 tonnes) et du Suisse Barry Callebaut (110 000 tonnes). Le Français Touton (93 000 tonnes) et l’Ivoirien S3C (85 000 tonnes) complètent ce quintette qui contrôle l’essentiel des flux.
Cette offensive réglementaire intervient dans un contexte particulièrement tendu. Les cours mondiaux du cacao ayant atteint des sommets historiques, un bras de fer s’est engagé entre les transformateurs internationaux et les négociants locaux.
Barry Callebaut et Olam ont significativement ralenti leurs achats, refusant de s’aligner sur les prix exigés par les fournisseurs ivoiriens regroupés au sein du Groupement des négociants ivoiriens (GNI).
Parallèlement à cette bataille commerciale, Abidjan poursuit sa stratégie de reconquête de la valeur ajoutée avec le démarrage effectif de l’usine de broyage Transcao-CI dans la zone industrielle d’Akoupé-Zeudji.
Cette entité, détenue par le CCC, vient de s’allier au groupe malaisien Guan Chong Berhad, quatrième producteur mondial de dérivés du cacao, qui entre à hauteur de 25% dans son capital.
Ce partenariat stratégique illustre la détermination de la Côte d’Ivoire, d’Alassane Ouattara, à progresser sur l’échiquier de la transformation locale du cacao, véritable cheval de bataille d’un pays qui entend capter davantage de la valeur générée par son or brun.
Malgré ces avancées, la contrebande vers les pays frontaliers comme le Burkina Faso, la Guinée et le Liberia demeure un défi persistant, en dépit du renforcement des dispositifs de surveillance.