Au gouvernement, dans la presse ou dans l’opinion publique, les Egyptiens ont exprimé ce mardi 11 février 2025, leur colère face aux menaces de Donald Trump de suspendre l’aide à l’Egypte et à la Jordanie si ces pays refusaient d’accueillir les Palestiniens de Gaza sur leur territoire.
« L’Egypte exhorte le monde à mettre fin à l’injustice historique contre le peuple palestinien », affirmait en première page le journal gouvernemental Al-Ahram tandis que le quotidien privé Al-Masri al-Yom titrait « Les Palestiniens en colère : Gaza n’est pas à vendre ».
Sur X, le hashtag « sous notre chaussure » expression populaire pour dire « peu nous chaut »— a fait son apparition pour répondre à ce que les Egyptiens considèrent comme une mesure d’intimidation.
Le président Abdel Fattah al-Sisi a appelé mardi à la reconstruction de Gaza « sans déplacer » les Palestiniens hors de leur terre, lors d’un appel téléphonique avec la Première ministre danoise, Mette Frederiksen.
Le ministère égyptien des Affaires étrangères avait rejeté la veille « tout compromis » pouvant porter atteinte aux droits des Palestiniens, notamment leur droit de « rester sur la terre », après une réunion à Washington entre le ministre Badr Abdelatty et son homologue américain, Marco Rubio.
– « Un acte de guerre » –
« L’Egypte envoie un message clair : toute tentative des Etats-Unis visant à favoriser l’entrée des Palestiniens en Egypte sera considérée comme une acte de guerre », a déclaré Gamal Bayoumi, ancien ministre adjoint des Affaires étrangères.
Selon lui, l’Égypte était bien préparée à toute mesure que Washington pourrait prendre, y compris un éventuel arrêt de l’aide financière américaine.
Les États-Unis fournissent à l’Égypte environ 1,3 milliard de dollars d’aide militaire par an, ce qui en fait l’un des plus grands donateurs étrangers du pays.
Selon les données du gouvernement américain, Le Caire a reçu environ 1,5 milliard de dollars d’aide militaire et économique de Washington en 2024.
Hussein Haridi, également ancien ministre adjoint des Affaires étrangères, a minimisé l’impact d’un arrêt de l’aide américaine, arguant qu’elle n’influencerait pas la position égyptienne sur Gaza.
« Ce petit montant – environ 200 millions de dollars d’aide économique n’affectera pas l’économie égyptienne », a déclaré Haridi à l’AFP.
« De toutes façons, nous ne céderons pas aux menaces de Trump », a-t-il déclaré.
Pour M. Haridi, le président américain ignore le « rôle historique » de l’Egypte dans la défense des intérêts arabes, et en particulier de la cause palestinienne.
« L’Egypte est tout à fait prête à y faire face et ces menaces se retourneront contre les intérêts américains dans la région », a-t-il dit.
« Soyons clair : ce n’est pas seulement la position de Sissi ou celle du gouvernement égyptien, c’est la position du peuple égyptien », a-t-il ajouté.
– « L’Egypte tiendra bon » –
Les propos de Donald Trump ont provoqué aussi l’indignation dans l’opinion publique.
« Après les avoir bombardés et tués, ils veulent maintenant les déplacer ? », s’est insurgé Samir Gomaa, un garagiste de 71 ans au Caire.
« C’est une terre palestinienne. Quel sain d’esprit vendrait une terre qui ne lui appartient pas et la transformerait en un projet touristique ? », dit-il à l’AFP.
« Nous n’abandonnerons jamais la cause palestinienne », a-t-il ajouté.
Malgré les énormes difficultés économiques de l’Égypte, marquées par une inflation galopante et une dette écrasante, de nombreux citoyens interrogés par l’AFP ont exprimé leur soutien à la position officielle du Caire sur la question.
L’Egypte, premier pays arabe à avoir signé en 1979 la paix avec Israël, mettant fin à l’état de guerre entre le deux pays voisins, se positionne depuis longtemps comme un médiateur clé dans le conflit israélo-palestinien, et plus récemment dans les négociations pour un cessez-le-feu dans la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza.
« Le monde arabe reconstruira Gaza et l’Egypte tiendra bon », a déclaré Mohamed Abdel Tawab, 53 ans, un négociant en papier.
Avec AFP