Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a subi un revers politique majeur mercredi 4 septembre 2024 avec l’annonce surprise par son principal allié de gauche de la fin de leur entente politique, qui visait à soutenir le gouvernement minoritaire des libéraux.
Le chef du gouvernement ne doit pas automatiquement appeler à de nouvelles élections, mais va devoir trouver de nouveaux soutiens au parlement pour survivre aux votes de confiance.
C’est dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux que le chef du Nouveau parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a annoncé qu’il se retirait de cette alliance conclue il y a trois ans.
« Je ne vais pas faire de politique aujourd’hui », a balayé le Premier ministre canadien, interrogé en marge d’un déplacement sur l’école dans la province de Terre-Neuve et Labrador, dans l’est du pays.
Dans son message, M. Singh n’a pourtant pas mâché ses mots contre ses anciens alliés: « Les libéraux sont trop faibles, trop égoïstes et trop proches des ultra-riches pour se battre pour les gens. »
Il a aussi accusé Justin Trudeau de ne pas être en mesure d’affronter l’opposition conservatrice. Cette dernière, emmenée par Pierre Poilievre, est largement en tête dans les sondages en vue des élections législatives qui doivent se tenir d’ici à la fin octobre 2025.
Selon un sondage Angus Reid publié mercredi, les conservateurs devancent très largement les libéraux, avec 43% d’intention de vote contre 21%. Quant au NPD, il est crédité de 19%.
Jagmeet Singh tiendra une conférence de presse jeudi.
Après la victoire serrée des libéraux de Justin Trudeau en septembre 2021 après des élections anticipées, le NPD avait accepté de soutenir le parti afin de le protéger des votes de confiance qui pourraient faire tomber le gouvernement.
En échange de ce soutien, le NPD a notamment pu faire adopter plusieurs programmes sociaux dont un nouveau programme de soins dentaires pour les Canadiens à faible revenu et une loi contre le recours à des travailleurs de remplacement lors d’une grève.
Cet accord devait durer jusqu’en juin 2025.
« Pas d’élections en hiver »
« Mais la pression était de plus en plus forte chez les néo-démocrates qui voulaient retrouver leur liberté de parole à l’approche des élections », explique à l’AFP Stéphanie Chouinard, professeure de sciences politiques au Collège militaire royal du Canada.
Mais cela ne veut pas dire que le NPD ne va plus soutenir les projets de loi du gouvernement, d’après les analystes politiques.
Et malgré ce bouleversement politique, les experts ne tablent pas sur des élections dans les prochaines semaines.
« Les néo-démocrates ne veulent pas forcément faire tomber le gouvernement et les conservateurs ne peuvent pas faire tomber le gouvernement tout seuls », estime auprès de l’AFP Félix Mathieu, professeur de science politique à l’université de Winnipeg.
La Chambre des communes canadienne compte actuellement 154 députés libéraux, 119 conservateurs, 32 députés du Bloc Québécois, 24 députés du NPD, deux Verts, trois indépendants et quatre sièges vacants.
« Il y a fort à parier que le gouvernement tombe autour du budget, soit au printemps. Car dans l’immédiat, aucun groupe minoritaire n’a intérêt à ce que les élections soient maintenant, à part les conservateurs », estime Mme Chouinard.
Et les petits partis « ont besoin de temps pour renouer avec leur propre base, essayer de trouver des candidats vedettes… », ajoute Lori Turnbull professeur à l’Université Dalhousie.
Par ailleurs, trois élections provinciales sont prévues à l’automne et, par convention, les élections législatives ne se déroulent pas en même temps. Et ajoute Stéphanie Chouinard, « en règle générale on évite les élections en hiver à cause du climat, car on peut avoir des tempêtes ».
Avec AFP