Au Cameroun, les prix du cacao affolent les producteurs. En effet, les cours de la fève rouge brique plongent à Douala. Le Système d’information des filières, piloté par l’Office national du cacao et du café, rapporte que le kilogramme se négocie depuis le 14 novembre 2025 entre 2 300 et 2 400 francs CFA au port.
La chute atteint 500 à 600 francs CFA par rapport aux 2 809 à 3 009 francs CFA observés dix jours plus tôt. Ce décrochage constitue le plus marqué depuis le 7 août 2025, date d’ouverture de la campagne 2025-2026.
Le SIF ne précise pas les causes de cette dégringolade. Les prix portuaires entraînent mécaniquement les tarifs bord champ. Les cacaoculteurs subissent donc un recul direct de leur rémunération. Bref, ce repli intervient alors que les producteurs espéraient profiter de l’assèchement des pistes en fin de saison pluvieuse.
Traditionnellement, cette période supprime les décotes appliquées par les acheteurs pour compenser les surcoûts logistiques. La séquence actuelle menace de contrecarrer cet effet saisonnier favorable.
Les autorités camerounaises tablent sur des prix moyens aux producteurs compris entre 3 200 et 5 400 francs CFA le kilogramme pour 2025-2026. La correction en cours met à l’épreuve cette cible. Le contexte international explique en grande partie cette tension.
Selon l’Organisation Internationale du Cacao, la saison 2024/2025 devrait marquer un excédent après un déficit record de 441 000 tonnes en 2023/2024. Les analystes des matières premières anticipent un surplus mondial d’environ 186 000 tonnes cette campagne. Un excédent de cette ampleur exerce une pression baissière sur les cours internationaux. Les répercussions se font sentir sur les prix domestiques et la rémunération des producteurs camerounais.
Le contraste est saisissant avec la campagne précédente. Au plus fort de la saison 2023-2024, les producteurs camerounais avaient perçu jusqu’à 6 300 francs CFA le kilogramme. Ce sommet avait fait des cacaoculteurs locaux parmi les mieux rémunérés au monde. Les prix avaient alors dépassé 6 000 francs CFA bord champ pendant plusieurs semaines. Le marché mondial connaissait alors une forte tension en raison d’une production insuffisante, notamment en Côte d’Ivoire et au Ghana.
La production mondiale devrait augmenter de 7,8 % à 4,8 millions de tonnes cette saison. La Côte d’Ivoire, premier producteur mondial, verrait sa récolte passer de 1,6 million de tonnes à 1,85 million de tonnes. Le Ghana devrait également voir sa production progresser à 600 000 tonnes contre 530 000 tonnes la saison précédente.
Les prix élevés de l’année passée ont incité les exploitants à investir davantage dans leurs plantations. Enfin, la demande mondiale recule de 4,8 % à 4,65 millions de tonnes en raison de la flambée des cours pour les transformateurs et les chocolatiers.
Le repli met en lumière la vulnérabilité des revenus agricoles à la conjoncture internationale. Entre août 2024 et juillet 2025, le Cameroun a commercialisé 309 528 tonnes, contre 266 710 tonnes l’année précédente, selon News du Cameroun. La progression atteint près de 16 %. Pourtant, cet effort d’augmentation de volume ne suffit pas à compenser la dépréciation des prix mondiaux. Les revenus à l’exportation risquent de se contracter malgré la hausse des tonnages.
Les producteurs font face à un marché qui se retourne rapidement. La Bourse de Londres, où se joue l’essentiel de la valorisation mondiale de la fève, détermine la rémunération des planteurs camerounais. La volatilité des cours reste désormais la caractéristique principale du marché.
À court terme, la priorité est d’atténuer la transmission intégrale des chocs externes par le calibrage des décotes et la fluidité de collecte. À moyen terme, la stabilisation passera par la qualité des fèves, la contractualisation plus prévisible et la réduction des coûts de transaction pour mieux lisser les oscillations des cours internationaux.