Au Burkina, le capitaine Ibrahim Traoré a coupé le ruban à Komsilga pour annoncer la reprise de la Société nouvelle Brasserie du Faso reprend vie après dix-sept ans d’arrêt.
Pour rappel, l’usine avait fermé ses portes en 2008, victime de pressions concurrentielles et de blocages internes qui avaient eu raison de ses ambitions industrielles.
La réhabilitation complète a nécessité 17,9 milliards de francs CFA. L’État détient désormais 70% du capital social fixé à 6 milliards. Le secteur privé conserve les 30% restants. Cette nouvelle structure juridique tranche avec les tentatives infructueuses du passé. Enfin, les autorités avaient racheté les actifs pour 11,1 milliards en 2012 sans jamais relancer la production.
Les travaux ont véritablement démarré en mars 2024 sur instruction du président. Serge Poda, ministre de l’industrie, a expliqué que l’investissement total s’élève à 17,9 milliards de francs CFA, dont 9 milliards pour les équipements et 8,9 milliards pour les infrastructures. Le chantier s’est déroulé entre le Burkina et la Chine sur vingt mois. La rapidité d’exécution contraste avec les années d’immobilisme qui ont suivi le rachat initial pour 40 milliards en 2012.
La capacité de production atteint 600 000 hectolitres par an. Deux marques sortent déjà des chaînes : Braf’or et Brafaso. L’usine prévoit à moyen terme de diversifier vers les boissons sucrées et l’eau minérale. Les matières premières proviendront du territoire national. Maïs, sorgho et riz alimenteront les cuves installées sur le site de 3,9 hectares.
Les retombées économiques s’annoncent conséquentes. Deux cents emplois permanents ont été créés, cent postes temporaires complètent le dispositif. Environ 20 000 emplois indirects devraient découler de cette activité selon les autorités. Bref, les chiffres parlent d’eux-mêmes dans un pays où le chômage des jeunes demeure préoccupant.
Le marché burkinabè de la bière comptait déjà Brakina, filiale du groupe Castel, et Libs Brasserie installée à Gampéla depuis 2019. Cette dernière affiche une capacité de 430 000 hectolitres et commercialise les marques Marina et Libs. L’arrivée de SN-BRAFASO rebat les cartes d’un secteur dominé depuis des décennies par quelques acteurs historiques. Le Burkina produit 3,1 millions d’hectolitres par an, deuxième rang de l’UEMOA derrière la Côte d’Ivoire et ses 4,8 millions.
L’histoire de cette brasserie a connu bien des soubresauts. Fondée en 2004, elle avait dû cesser ses activités quatre ans plus tard sous la pression de multinationales réfractaires à voir émerger un concurrent local. Les locaux sont restés vides pendant des années. Le rachat étatique de 2012 n’avait abouti à rien de concret malgré les promesses répétées de redémarrage.
La production locale de boissons répond à une logique de souveraineté économique affichée par les autorités. Réduire les importations, transformer sur place les céréales cultivées dans les provinces, capter la valeur ajoutée : le discours officiel martèle ces objectifs depuis l’arrivée au pouvoir du capitaine Traoré. D’autres unités industrielles devraient rouvrir dans les prochains mois selon les annonces gouvernementales.
Le secteur agroalimentaire burkinabè compte plusieurs projets en attente de concrétisation. La question du financement reste centrale pour ces ambitions de relance industrielle. Les banques publiques et les fonds d’État sont sollicités tandis que les partenaires privés scrutent les garanties offertes avant de s’engager massivement.