La menace d’un procès se rapproche pour la ministre de la Culture Rachida Dati : la cour d’appel de Paris a rejeté sa demande de faire reconnaître la prescription des faits et donc de mettre fin aux poursuites pour corruption qui la visent dans un volet de l’affaire Ghosn.
La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris « n’a pas fait droit à la demande de Rachida Dati« , ont déclaré à la presse deux de ses avocats, Mes Olivier Pardo et Olivier Bluche.
Une source judiciaire a confirmé cette décision à l’AFP
« Le fond n’est pas du tout tranché. Le problème est que le temps est un outrage à la mémoire. Il est difficile d’appréhender une affaire quinze ans après les faits« , ont réagi dans un communiqué Mes Olivier Pardo et Olivier Baratelli, autre avocat en défense, annonçant se pourvoir en cassation.
L’ancienne garde des Sceaux et actuelle maire du VIIe arrondissement de Paris est mise en examen depuis juillet 2021 pour corruption et trafic d’influence passif par personne investie d’un mandat électif public.
Dans cette information judiciaire, ouverte depuis 2019, le Parquet national financier (PNF) doit prochainement rendre ses réquisitions avant que les juges d’instruction ne tranchent sur la tenue d’un procès, ou non, devant le tribunal correctionnel contre elle et l’ancien patron du groupe automobile Renault-Nissan.
La menace d’un procès « fait partie effectivement des éventualités mais à ce stade, la procédure va suivre son cours avec les voix de recours« , a commenté Me Bluche.
Rachida Dati est soupçonnée d’avoir perçu 900.000 euros de la part de RNBV, filiale de l’alliance Renault-Nissan, sans contrepartie d’un travail réel, entre 2010 et 2012, alors qu’elle était avocate et députée européenne (2009-2019).
Les investigations ont cherché également à déterminer si cette convention d’honoraires aurait pu servir à masquer une activité de lobbying au Parlement européen, interdite à tout élu.
Dans ce dossier, Carlos Ghosn, qui vit au Liban, fait l’objet d’un mandat d’arrêt international depuis avril 2023.
L’ancien magnat de l’automobile et la ministre de la Culture contestent toute irrégularité.
« Activité d’avocate réelle«
Mme Dati a multiplié les recours tout au long de la procédure. La chambre de l’instruction avait déjà refusé en 2021 de constater la prescription des faits reprochés.
C’est sur la base d' »éléments nouveaux, fondamentaux » que les avocats de Mme Dati avaient assuré avoir saisi les juges d’instruction puis la cour d’appel, pour obtenir, en vain, la prescription des faits.
« Nous considérons que les faits sont prescrits car la victime, RNBV et Renault, avait une parfaite connaissance de l’activité d’avocate réelle de Mme Dati« , a affirmé Me Pardo, précisant avoir « amené un nombre considérable de témoignages de personnes chez Renault qui disaient connaître parfaitement l’intervention de Mme Dati » en Algérie, au Maroc, en Iran, en Turquie et en Inde.
Le délai de prescription, trois ans à l’époque, débuterait donc au moment de la signature de la convention entre RNBV et Mme Dati en 2009 et non en 2019 avec la plainte d’une actionnaire de Renault, soutient la défense.
Les avocats reprochent à Renault de ne pas fournir des « éléments de comptabilité, de traitements de factures, de traitement des rapports de Mme Dati » étant « à décharge« , et déplorent « de nombreuses pages manquantes » dans le rapport rendu par le cabinet Mazars.
Cet audit avait été mené à la demande de Renault et Nissan afin d’examiner les dépenses litigieuses de RNBV, objet d’une autre enquête judiciaire à Nanterre mettant en cause l’ancien magnat de l’automobile.
« On utilise le dossier ouvert contre Mme Dati comme un marche-pied dans l’affaire de M. Carlos Ghosn« , a regretté Me Bluche.
Par ailleurs, la cour d’appel n’a pas transmis mardi une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le délai de forclusion, six mois en matière de prescription, a précisé la source judiciaire. La défense a annoncé formé un pourvoi également contre cette décision.
Avec AFP
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