AES : fini les ressources bradées, le Burkina Faso, le Niger et le Mali imposent…

AES : fini les ressources bradées, le Burkina Faso, le Niger et le Mali imposent…

Crédit Photo : DR

Fini les ressources bradées au Burkina Faso, au Niger et au Mali qui se sont réunis au sein de l’AES.

L’annonce de la nationalisation par le Niger jeudi de la Somaïr, filiale du géant français de l’uranium Orano, est la dernière d’une série de mesures draconiennes des juntes sahéliennes visant les industries minières étrangères au nom du souverainisme.

Les militaires qui ont renversé les gouvernements en place au Mali, au Burkina Faso et au Niger depuis 2020 imposent une pression démultipliée aux miniers étrangers, surtout occidentaux.

– Cascade de mesures –

Au Niger, la nationalisation de la Somaïr vient ponctuer des mois de bras de fer avec Orano, qui avait annoncé avoir perdu le contrôle opérationnel de sa filiale depuis des mois.

Au Mali, le géant canadien Barrick Mining et les militaires s’opposent depuis l’entrée en vigueur d’un nouveau code minier en 2023, poussant la junte au pouvoir à réclamer des centaines de millions de dollars d’arriérés d’impôts à l’entreprise.

Barrick a perdu le contrôle opérationnel de Loulo-Gounkoto, la plus grande mine d’or du pays, qu’il détient majoritairement et qui est désormais dirigée par un administrateur provisoire malien pour une durée de six mois.

Les militaires maliens ont aussi arrêté le directeur et deux employés de la société australienne Resolute Mining en novembre 2024, qui ont ensuite été relâchés contre l’engagement de leur employeur à payer 160 millions de dollars.

Auparavant, d’autres industriels comme les Canadiens Allied Gold, B2Gold et Robex avaient accepté de revoir les conditions de leur activité et de payer pour régler leurs litiges fiscaux ou douaniers.

Au Burkina Faso, où un nouveau code minier est en vigueur depuis 2024, la junte avait réquisitionné 200 kg d’or en 2023, produits par une filiale du groupe canadien Endeavour Mining, pour « nécessité publique ».

– Fini les ressources « bradées »

Pour ces régimes militaires, qui ont rompu avec la France ou la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), il s’agit de rétablir leur souveraineté sur des ressources naturelles qu’ils estiment auparavant « bradées », et de faire profiter les populations de cette richesse.

Le Niger fournit 4,7% de la production mondiale d’uranium. L’or contribue à un quart du budget national du Mali. Et au Burkina Faso, la production aurifère représente environ 14% des recettes du pays, selon les chiffres officiels.

« La population voit ça comme un élan d’affranchissement des États qui étaient auparavant, selon les nouveaux régimes, inféodés aux Occidentaux et donc aux intérêts étrangers », explique Jérémie Taïeb, directeur de Tikva Partners, un cabinet de conseil sur l’Afrique. Ce rejet « permet de satisfaire l’opinion publique et sert un discours qui permet de pérenniser aussi le pouvoir ».

Les trois pays, désormais réunis au sein d’une confédération, l’Alliance des Etats du Sahel (AES), sont minés par des violences jihadistes qui ont fait des milliers de morts sur leurs territoires.

« Les sanctions économiques antérieures imposées par la Cedeao et les pressions exercées pour financer la lutte contre le terrorisme et les activités gouvernementales sont autant de raisons » pour les régimes sahéliens « de tirer davantage de revenus du secteur », estime Beverly Ochieng, analyste à la société Control Risks.

– Tentatives d’arbitrages internationaux –

Pour faire face aux juntes, les industries minières se sont tournées vers l’arbitrage international.

Barrick a entamé une procédure auprès du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), une organisation de la Banque mondiale basée à Washington.

Orano a fait de même, engageant plusieurs procédures contre l’Etat du Niger et dénonçant « une politique systématique de spoliation des actifs miniers ».

– Les nouveaux acteurs russes et chinois –

Cette « instabilité juridique » au Sahel peut pousser les investisseurs vers des pays au cadre plus stable, dit Jérémie Taïeb.

Mais pour Beverly Ochieng, « les opérateurs étrangers continueront probablement à s’engager auprès des administrations sahéliennes », car « les actifs miniers constituent un investissement lourd et à long terme ».

Le climat actuel profite pour l’heure aux « partenaires de sécurité » du Mali, du Niger et du Burkina Faso (AES). Il s’agit notamment de la Turquie, de la Chine et de la Russie, présente au Mali avec son groupe paramilitaire Africa Corps pour lutter contre les jihadistes.

Pour les Russes, « c’est minerais contre armement. De la même manière pour les Chinois, c’est minerais contre infrastructures », précise M. Taïeb.

Lundi, le Mali et la Russie ont lancé les travaux de construction d’une nouvelle raffinerie d’or à Bamako.

Avec AFP

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